Sophie Nordmann
Le désir de s’élever, qui a longtemps été un idéal individuel et collectif, résonne aujourd’hui comme une menace pour l’humanité. À l’heure où nous nous retrouvons coincés entre le triomphe de la technoscience et les injonctions à redevenir des animaux humains, veillons à nous faire les gardiens de l’inachevé.
Jacques Tournier
L’élévation de l’homme, chemin de l’humanité
Se lever a conduit au développement de capacités qui ont disposé l’être humain à être travaillé par l’épreuve d’un manque et, en contrepartie, par les mouvements inconscients d’un désir l’engageant sur la voie de son humanisation progressive. Or, si les hommes ont longtemps délégué à des figures transcendantes la garde des principes fondateurs de l’économie du désir qui les constitue, ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Éric Letonturier
S’élever à l’heure de la modernité
Quels sont les différentes formes que prend l’élévation, sa définition initiale, le projet auquel l’associe traditionnellement la culture occidentale, les mutations de sens que la modernité lui impose ? Et quelles sont leurs limites respectives ?
Patrick Clervoy
Le dictionnaire dit que l’ambitieux a soif de réussite et d’honneurs ; des honneurs que l’on peut chercher dans le respect des règles et des personnes. L’arriviste, lui, est celui qui n’est pas à la hauteur de la concurrence et ne parvient à ses fins que par fourberie. Or on peut s’élever par ambition ou par arrivisme. Notamment dans le monde militaire.
Éric Anceau
La défiance des français envers leurs élites, un phénomène de longue durée
Les rapports que les Français entretiennent avec leurs élites sont marqués du sceau de la défiance. Un phénomène qui ne date ni d’hier ni même d’avant-hier. Dès le xviiie siècle et l’émergence d’un espace public, les attaques se sont multipliées et expliquent, pour partie, l’histoire mouvementée de notre pays.
Anne Gotman
La mobilité sociale, un engin défectueux
La mobilité sociale est un élément programmatique des sociétés libérales, égalitaires et démocratiques, et est recherchée comme telle. S’élever « au-dessus » de ses origines est également une norme des sociétés individualistes qui fait l’objet de savants comptages. Pour autant, elle n’est pas sans coût social.
Elrick Irastorza
L’armée de terre, escalier social
Aujourd’hui, dans l’armée de terre, seuls 43 % des sous-officiers et 51 % des officiers sont de recrutement direct ; les autres sont issus de la promotion interne. Le chemin est rude, semé d’embûches, mais cette ascension par l’effort s’accompagne d’une réelle élévation professionnelle et sociale qui ne s’arrête pas aux portes de la caserne. Un modèle original.
Damien Carlier
Détecter les potentiels en corps de troupe
« Tout soldat porte dans sa giberne le bâton de maréchal. » Cette méritocratie est aujourd’hui encore d’actualité. Les actions d’éclat et le courage au combat ne peuvent cependant pas être les uniques critères de sélection ; une démarche quotidienne du commandement de proximité est essentielle pour détecter les potentiels et révéler les talents des jeunes gens qui sont la force vive des armées.
Clément Oury
Stratégies de l’ascension sous l’ancien régime : le duc de Marlborough
On a du mal à imaginer un rejeton de la petite noblesse, ruiné de surcroît, commander la plus puissante armée européenne de son temps et se trouver sur un pied d’égalité avec des princes souverains. C’est pourtant ce à quoi est parvenu John Churchill, premier duc de Marlborough. Une ascension révélatrice des logiques de promotion sociale à l’œuvre dans l’Europe de l’Ancien Régime.
Walter Bruyère-Ostells
Devenir général sous la révolution et l’empire, un modèle de méritocratie ?
Dès les premières années de la Révolution, s’élever dans la hiérarchie sociale par la carrière des armes semble être une voie de choix. Il convient néanmoins d’appréhender plus finement le caractère révolutionnaire de l’avancement au sein des armées à partir de 1789, de mieux analyser les mécanismes de la « fabrique » des généraux et des maréchaux au-delà de la rupture méritocratique.
Max Schiavon
Le rôle des maréchaux de la grande guerre dans la promotion des commandeurs du désastre de 1940
Les maréchaux de la Grande Guerre, incarnations de la victoire et objets d’une extraordinaire glorification dans l’entre-deux-guerres, ont soutenu ou poussé vers la haute hiérarchie militaire des « poulains » qui assumeront de hautes responsabilités au cours de la Seconde Guerre mondiale. Quelle était la nature de ce lien ? Cette filiation a-t-elle joué un rôle dans la défaite de 1940 ?
Hervé de Courrèges
Ils s’élèvent pour vaincre
L’Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan forme ses élèves pour être les chefs militaires de demain, les forgeant « à la hauteur des chocs futurs ». Une « hauteur » qui fait écho au thème de ce numéro. La dimension de verticalité est en effet intrinsèquement liée à la notion de hiérarchie, car l’une des premières préoccupations d’un chef est de faire grandir son subordonné.
Maxime Yvelin
S’élever est au cœur de l’expérience du soldat : cela sonne comme une évidence. Mais quels en sont les mécanismes ? La vie militaire est une perpétuelle élévation collective perceptible, notamment, lors d’une passation de commandement.
Louis Peytou
« S’il nous est difficile au cours d’une marche éreintante ou d’une leçon trop longue de voir comment cette scolarité nous a changés, force est de constater que nous ne nous reconnaissons plus parmi les étudiants de classes préparatoires dont nous avons conservé la fréquentation. » Que s’est-il passé en un an pour que le jeune élève-officier auteur de ces lignes se sente si différent ? Témoignage.
Jean-Luc Cotard
Une recette pour un appel
Pour Pierre Guillet, s’élever n’est pas un objectif de dirigeant, tout au plus un indicateur, notamment de l’amélioration des compétences de ses collaborateurs. Pour s’élever, il faut d’abord penser à aider les autres à grandir et surtout à prendre du temps pour discerner.
Marie-Amélie Le Fur
Le parasport, facteur d’acceptation, d’affirmation et d’inclusion
Comment la pratique sportive permet-elle aux personnes atteintes de handicap de « s’élever » ? Quels moyens sont mis à leur disposition pour cela ? Marie-Amélie Le Fur, athlète handisport, médaillée olympique et présidente du Comité paralympique et sportif français, a accepté de répondre à nos questions à partir de son expérience personnelle et professionnelle.
Vivien Pertusot
Société à mission : conjuguer intérêts économiques et enjeux sociétaux
Même dans des secteurs qui semblent peu s’y prêter, comme le monde du commerce et des affaires, des initiatives existent et montrent une volonté d’élévation. C’est le cas des sociétés à mission qui gagnent en attractivité tant elles recherchent un modèle d’affaires responsable et utile au collectif, c’est-à-dire compatible avec des préoccupations sociales ou environnementales.
Grégory Kourilsky
« Sortir du monde » dans la tradition bouddhique : s’élever ou faire un pas de côté ?
L’élévation est a priori synonyme de noblesse, de grandeur d’âme, de hauteur de vue. On pourrait penser que tout mouvement ascendant ne saurait être perçu qu’avec une connotation positive. Un regard porté au bouddhisme, à son dogme comme à sa pratique, apporte une nuance à cette vision.
Samuel Rouvillois
Les traditions croyantes invitent à s’élever pour rencontrer ce qui est « au-dessus » de l’homme. Or prier, c’est plutôt laisser descendre le souffle du Très Haut dans le concret de nos existences avec leur part de souffrance. Et par le ciment de fraternité qu’elle crée, la prière permet de s’élever ensemble.