N°52 | S’élever

Claude Franc
Pages de stratégie
Chroniques et articles destinés aux candidats à l’École de guerre
Claude Franc, Pages de stratégie, Éditions Pierre de Taillac

À la vue du sous-titre, le lecteur peut être peu intéressé par cet ouvrage. Mais le manque d’intérêt a priori n’empêche pas de le feuilleter. La lecture du sommaire souligne les deux préoccupations annoncées : la stratégie en général et l’application de la théorie stratégique aux opérations, à l’action. La pagination souligne la brièveté des chapitres : quatre à cinq pages maximum. Les sujets sont assez variés et prétextes à l’apport de connaissances précises. Nous sommes donc en présence d’un recueil de fiches rédigées pour le cdec, la Revue Défense nationale ou Le Casoar, qui permettent d’aborder l’histoire militaire occidentale depuis la fin du xixe siècle et dont la réalisation peuvent servir de modèle. Claude Franc part des réflexions stratégiques et de leurs applications concrètes avec un résumé clair des théories de Mahan et de Mac Kinder jusqu’à un remarquable point de situation du lieutenant-colonel commandant le 1er régiment étranger parachutiste en 1958. Ces deux dernières pages permettent de comprendre ce qui est attendu d’un officier candidat à l’École de guerre : à partir d’une situation sur le terrain, analyser ce que peut faire l’ennemi, comment peuvent manœuvrer les troupes amies et, en fonction des moyens, en déduire des modes d’action. Les phrases sont extrêmement simples, la réflexion profonde, l’exposé limpide. Mais pour arriver à cela, il faut avoir à l’esprit ce qui se passe autour de l’action, d’où l’importance des autres fiches qui donnent chacune des éléments factuels, des analyses, qui, outre l’idée principale (les militaires diraient l’idée maîtresse), permettent de construire une réflexion personnelle. Dans ce domaine, il est intéressant de lire la fiche consacrée à « La pensée stratégique du général de Gaulle », qui aborde non seulement la façon dont elle s’est construite, mais aussi comment elle a été imposée avec le mécanisme politique et sociologique qui a conduit à l’éviction des militaires du débat public et à l’apparition d’une forme de conservatisme de la pensée militaire.

Ce livre, très facile à lire ou simplement à parcourir, est finalement plus qu’une succession de fiches à l’attention de candidats à un concours. C’est un livre de culture générale, qui ouvre à la réflexion tant stratégique que politique ou sociologique. On peut regretter néanmoins qu’il n’y ait pas d’analyse de la catastrophe de juin 1940 ou de la campagne d’Italie de 1944, qui toutes deux posent la question du choix des élites militaires et de leur formation, ce qui est à l’origine le propos de cet ouvrage.


Les Fabriques identitaires de ... | Nicolas Bianchi et Fabien Meynier (dir.)
Jean-Luc Leleu | Combattre en dictature