Colonel de l’armée de terre, actuellement chef de corps du 3e régiment du génie, anciennement détaché au laboratoire de recherche de la défense (lrd) de l’Institut français des relations internationales (ifri), Rémy Hémez s’intéresse dans cet ouvrage, dont le titre est transparent (ce qui est assez ironique compte tenu du sujet), à un thème diversement couru de la culture militaire occidentale. Après avoir démonté l’accusation d’anglicisme du terme « déception » régulièrement faite, il revient longuement sur les concepts de déception, ruse, tromperie et perfidie avant de proposer au lecteur une mise en perspective de leurs applications. Son propos est d’abord une synthèse des opérations de déception de la Grande Guerre à nos jours. S’il n’est pas exhaustif sur le sujet (il faudrait dans ce cas remonter jusqu’à l’Antiquité et le nombre de pages exploserait), le livre contient un impressionnant corpus de notes et une bibliographie qui ouvrent autant de pistes de lecture pour la personne désireuse d’aller plus loin. Le sujet est riche et Rémy Hémez l’illustre bien avec de multiples exemples historiques. Et le dernier chapitre recense les nombreuses pistes offertes par les progrès technologiques (cyber, intelligence artificielle...). Si les applications potentielles sont vastes, tant dans le domaine de la déception que de la contre-déception, l’auteur rappelle lucidement son lecteur à ce constat : « La sophistication de la guerre, loin de brider la ruse, en multiplie la variété et les possibilités. » Les Opérations de déception brosse un passionnant panorama de cette pratique guerrière qui vise directement l’esprit humain, de manière individuelle et collective. En tant que militaire, Rémy Hémez pave la voie à une compréhension et à une intégration des effets démultiplicateurs de la déception (« une artillerie mentale ») dans la culture militaire française. Accessible, vivant grâce aux nombreux exemples qui s’enchaînent et qui sont mis en perspective, précis et efficace dans son écriture, cet ouvrage constitue une lecture de choix pour le militaire ou l’amateur d’histoire, « parce que ruser demeure indispensable pour vaincre ».