« Il semblerait qu’à chaque siècle surgisse, avec une régularité qui ferait croire à une loi de la nature, un pays ayant la puissance, la volonté et l’élan intellectuel et moral nécessaires pour modeler le système international conformément à ses valeurs propres. Au xviie siècle, la France de Richelieu introduit la conception moderne des relations internationales fondée sur l’État-nation et déterminée par la recherche de l’intérêt national comme but ultime. Au xviiie siècle, la Grande-Bretagne définit la notion de l’équilibre des forces qui domina la diplomatie européenne pendant les deux siècles suivants. Au xixe siècle, l’Autriche de Metternich reconstruisit le concert européen et l’Allemagne de Bismarck le démantela, transformant la diplomatie européenne en un jeu impitoyable de politique de puissance. »
Ainsi Henry Kissinger introduit-il dans Diplomacy sa remarquable histoire des relations internationales au cours des quatre derniers siècles de notre ère. Quand bien même l’historien s’attache-t-il, à partir de ces prémices, à marquer combien l’entrée en scène des États-Unis d’Amérique au xxe siècle a radicalement modifié le cours de ces relations, opposant à la recherche permanente d’un équilibre des forces toujours aléatoire la croyance en un ordre international fondé sur la démocratie, la liberté du commerce et le droit international, l’homme politique qu’il fut doit en convenir : la politique internationale, dans ses fondamentaux, se ramène toujours, peu ou prou, à un « jeu impitoyable de politique de puissance ».
Et nul n’est mieux placé pour le dire que celui qu’Henry Kissinger tient pour l’inventeur de la diplomatie moderne. Relisons au chapitre « Qui traite de la puissance du Prince », dans le Testament politique de l’éminentissime cardinal duc de Richelieu, grand amiral de France et Premier ministre, ces quelques phrases : « La puissance étant une des choses les plus nécessaires à la grandeur des rois et au bonheur de leur gouvernement, ceux qui ont la principale conduite d’un État sont particulièrement obligés de ne rien omettre qui puisse contribuer à rendre leur maître si autorisé qu’il soit, par ce moyen, considéré de tout le monde. Comme la bonté est l’objet de l’amour, la puissance est la cause de la crainte, et il est certain qu’entre tous les principes capables de mouvoir un État, la crainte, qui est fondée sur l’estime et sur la révérence de la force, est celui qui intéresse davantage chacun à faire son devoir. Si ce principe est de grande efficace au respect du dedans des États, il n’en a pas moins au regard du dehors, les sujets et les étrangers regardant avec mêmes yeux une puissance redoutable... Un prince doit être puissant par sa réputation, par un raisonnable nombre de gens de guerre continuellement entretenus, par une notable somme de deniers dans ses coffres pour subvenir aux dépenses qui serviront souvent quand on y pense le moins... Qui a la force a souvent la raison en matière d’État, et celui qui est faible peut difficilement s’exempter d’avoir tort au jugement de la plus grande partie du monde. »
Et d’ajouter quelques chapitres plus loin que « la guerre est quelquefois un mal inévitable... Les États en ont besoin en certains temps pour purger leur humeur, pour recouvrer ce qui leur appartient, pour venger une injure dont l’impunité en attirerait une autre, pour garantir d’oppression leurs alliés, pour arrêter le cours et l’orgueil d’un conquérant, pour prévenir les maux dont on est apparemment menacé et dont on ne saurait s’exempter par d’autres voies, et enfin pour divers autres accidents ».
Ce mal parut si inévitable aux contemporains et aux successeurs du cardinal botté que durant trois siècles, la norme européenne des relations internationales fut la guerre, creuset de la plupart des nations européennes. La diplomatie ne fut pas pour autant reléguée au rang de comparse, car selon un principe déjà très clausewitzien, le cardinal avait lui-même prescrit que « négocier sans cesse, ouvertement ou secrètement, en tous lieux, encore même qu’on n’en reçoive pas un fruit présent et que celui qu’on en peut attendre à l’occasion ne soit pas apparent, est chose tout à fait nécessaire pour le bien des États ». Principe qui fut appliqué à la lettre durant les cinq années qui précédèrent la signature des traités de Westphalie, mais qui ne saurait contredire cette donnée d’évidence : l’histoire des relations internationales est d’abord une histoire de la puissance, dont le postulat fondateur est le besoin de sécurité des peuples. Et au nombre des multiples composantes de la puissance, dès lors que l’État parvenu à l’âge adulte s’assure le monopole de la violence, la composante militaire devient un attribut majeur de la souveraineté de la chose publique.
Dans un ouvrage paru récemment et consacré à La Puissance au xxie siècle, Pierre Buhler rapporte qu’en Angleterre, à compter du xiie siècle, « les fonctions de l’État sont principalement militaires et géopolitiques : sur une période de sept siècles, la proportion des ressources fiscales vouées à l’acquisition et à l’emploi de la force armée variera entre 70 et 90 %... Ainsi, chaque croissance de l’État aura été le résultat de développements liés à la guerre, les dépenses civiles ne représentant que la portion congrue ». La monarchie française n’a pas développé un modèle différent.
De tous les États qui naquirent en Europe de l’écroulement du rêve d’empire universel, la France fut sans doute tout au long du deuxième millénaire le plus belliqueux, enchaînant victoires et défaites sans que cette succession souvent imprévisible mît à mal, au moins jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, sa réputation de puissance militaire de premier plan. Et les causes de l’« étrange défaite » de 1940 furent autant politiques, économiques, morales que militaires. Rarement dans l’histoire de ce « vieux pays », l’écart fut aussi grand entre un corps de bataille tout entier conçu pour la défense du territoire et une diplomatie attachée à la constitution de coalitions et d’alliances de revers. Ce bref rappel pour souligner combien, dans une Europe qui des siècles durant ne vit jamais dans la paix autre chose qu’une veillée d’armes, la puissance d’un État ne pouvait tenir que dans la plus grande cohérence entre ses différentes composantes.
Or cette cohérence se trouva en France soumise à rude épreuve avec l’avènement de la guerre froide. Dans la décennie qui suit la fin de la Seconde Guerre mondiale, la France, qui n’a plus que les apparences d’une puissance à vocation mondiale, voit ses forces armées intégrées dans une organisation multilatérale qu’elle ne contrôle pas, à l’exception notable de celles qu’elle engage dans des combats d’arrière-garde dans un empire français finissant. Mais dans le même temps, elle ouvre une voie nouvelle qui rompt avec des siècles d’histoire européenne : en posant avec l’adversaire d’hier la première pierre d’une entreprise qui a pour ambition la réalisation de l’unité du continent, elle esquisse le concept d’une puissance fondée sur la paix et donc sur un possible renoncement à la guerre entre nations d’Europe. Dans l’imaginaire européen, cette novation pourrait se traduire par une dévaluation, sinon une marginalisation, de la composante militaire de la puissance. À ceci près qu’en pleine guerre froide, l’Europe nouvelle ne peut feindre d’ignorer les risques que, désarmée, elle encourrait face aux ambitions du bloc d’en face. Le protecteur américain ne saurait au demeurant y consentir. D’où la timide tentative de la Communauté européenne de la défense (ced), dont l’échec dissuadera pour au moins quarante ans les Européens de chercher leur salut hors de l’Alliance atlantique.
Seule la France ne l’entendra pas ainsi, lorsque le fondateur de la Ve République, une fois apuré le passif colonial, choisira, au contraire de nos partenaires européens, de tirer parti de la guerre froide pour redonner du lustre au concept d’une France grande puissance (« La France ne peut être la France sans la grandeur »). Il faudra, pour y parvenir, définir une ligne politique claire. Celle-ci sera ainsi présentée après coup dans les Mémoires d’espoir : « Mon dessein consiste donc à dégager la France, non pas de l’Alliance atlantique que j’entends maintenir à titre d’ultime précaution, mais de l’intégration réalisée par l’otan, sous commandement américain ; à nouer avec chacun des États du bloc de l’Est et, d’abord, avec la Russie des relations visant à la détente, puis à l’entente et à la coopération ; à en faire autant, le moment venu, avec la Chine; enfin, à nous doter d’une puissance nucléaire telle que nul ne puisse nous attaquer sans risquer d’effroyables blessures. Mais, ce chemin, je veux le suivre à pas comptés, en liant chaque étape à l’évolution générale et sans cesser de ménager les amitiés traditionnelles de la France. »
En termes de puissance, la crédibilité d’une telle ambition politique repose sur une force militaire capable d’assurer la défense du territoire national, la priorité stratégique absolue étant à cet égard accordée à la dissuasion nucléaire ; capable également d’agir en coordination avec les forces de l’otan malgré la sortie des forces françaises de la structure intégrée de commandement ; capable enfin d’intervenir seule si besoin est sur des théâtres extérieurs, c’est-à-dire pour l’essentiel dans l’espace africain qui, seul, offre à la France la profondeur stratégique sans laquelle il n’est pas de puissance militaire qui vaille. Les accords de défense avec les gouvernements africains et les bases françaises y pourvoiront. Complément indispensable de cette politique de défense, le développement d’une industrie de défense, à vocation exportatrice.
Mais que faire dans ce contexte de la contrainte européenne ? Puissance économique de stature mondiale, la Communauté européenne n’aspire pas au statut de grande puissance : après l’échec de la ced, les tentatives de la France pour entraîner ses partenaires dans l’édification d’une Europe politique, qui prendrait en charge sa défense, viennent buter sur la confiance inébranlable que ceux-ci accordent à l’otan et au parapluie nucléaire américain, dont ils feignent d’ignorer le caractère aléatoire. La France se borne donc à nouer une coopération utile avec l’Allemagne fédérale autour de la brigade franco-allemande puis du corps européen, noyau improbable d’une future défense européenne, pour le cas où…
Le cas où… surgit à la fin de la guerre froide. Laissons à nouveau la parole à Henry Kissinger, qui écrit en 1994 : « Dans le monde de l’après-guerre froide, les diverses composantes [de la puissance] – militaires, politiques, économiques – vont vraisemblablement être mieux proportionnées et plus symétriques. La puissance militaire relative des États-Unis diminuera progressivement. L’absence d’adversaire clairement identifié engendrera une pression intérieure qui incitera à affecter les ressources de la défense à d’autres priorités… Lorsque chaque pays aura sa propre perception des menaces, autrement dit lorsque toute idée d’adversaire unique aura disparu, les sociétés qui s’étaient réfugiées sous l’aile protectrice de l’Amérique se sentiront tenues d’assumer une plus grande part de leur sécurité. Ainsi, le fonctionnement du nouveau système international s’orientera vers un point d’équilibre, y compris dans le domaine militaire… Le nouvel ordre ressemblera davantage au système étatique des xviiie et xixe siècles qu’aux schémas rigides de la guerre froide. Il comprendra au moins six grandes puissances – les États-Unis, l’Europe, la Chine, le Japon, la Russie et probablement l’Inde. » Système étatique avec lequel, Henry Kissinger le reconnaît, « les États-Unis ont toujours été en délicatesse ».
Le sursaut américain, notamment militaire, engendré par les attentats du 11 septembre 2001, aurait pu entraîner un retour sur le devant de la scène internationale de l’hyperpuissance et de ses poussées de fièvre hégémonique. De fait, il n’en a rien été : en Irak comme en Afghanistan, la « République impériale » va rencontrer ses limites. Dès lors, le paysage mondial qui se dessine au terme de la première décennie du xxie siècle approche celui dont, de façon prémonitoire, l’ancien secrétaire d’État traçait voici une quinzaine d’années les grandes lignes : un monde multipolaire, largement recentré sur l’Asie et le Pacifique, mais dans lequel l’Europe, fort isolée à l’extrémité occidentale du continent eurasiatique, semble toujours ignorer cette redistribution des cartes de la puissance à l’échelle mondiale et se complaire dans le rôle de géant économique et de nain politique.
Y a-t-il dès lors la moindre chance de voir à bref délai l’Union européenne mettre enfin en chantier la politique européenne de sécurité et de défense (pesd) inscrite dans les traités depuis vingt ans ? Pour l’heure, certainement pas. Aucun débat sur la sécurité de l’Europe ne peut aujourd’hui se conclure à Bruxelles sans référence explicite à l’otan. Et ce avec d’autant plus de naturel depuis le retour au bercail du fils prodigue français. Sans doute le traité de Lisbonne a-t-il intégré une « clause de défense territoriale » ; il n’en dispose pas moins que pour les États qui en sont membres, l’otan demeure « le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre ». De retour dans la structure intégrée, la défense de la France s’inscrit aujourd’hui sans aucune ambiguïté dans ce cadre de grande unanimité. Qu’il s’agisse de « défense territoriale » ou de « défense de projection », le rôle de l’otan demeure central (Bosnie, Kosovo, Afghanistan, lutte contre la piraterie maritime, Libye), même si l’Union européenne est parvenue à élaborer en 2003 une stratégie européenne de sécurité qui lui a permis de lancer quelques opérations de gestion de crises, à caractère généralement plus civiles que militaires. Mais il sera difficile d’aller plus loin, tant les vingt-sept États membres peinent à dégager une vision commune des menaces qui pèsent sur la sécurité de l’Europe et des voies et moyens pour y faire face.
Doit-on en conclure qu’en réintégrant la structure de commandement de l’otan, la France aurait renoncé, rompant avec une ambition constamment affirmée durant quarante ans par tous les successeurs du général de Gaulle, à son statut de puissance ? Dans l’ouvrage précité, Pierre Buhler rapporte que dans The Grand Chessboard : American Primacy and its Geographic Imperatives, Zbigniew Brzezinski, s’interrogeant en 1997 sur la capacité des États-Unis à préserver leurs positions dominantes là où la maîtrise des affaires du monde est désormais en jeu, c’est-à-dire à la périphérie de l’espace eurasiatique, désignait nommément les « acteurs géopolitiques » avec lesquels Washington devait compter, la Russie et la Chine bien sûr, mais aussi la France, l’Allemagne et l’Inde. Qu’entendait-il par « acteur géopolitique » ? Un « État qui a la capacité et la volonté d’exercer puissance ou influence au-delà de ses frontières pour modifier, à un degré affectant les intérêts des États-Unis, le statu quo géopolitique ». Ayant eu une part directe, à l’instar d’Henry Kissinger, à l’action politique internationale des États-Unis, Z. Brzezinski ne peut être soupçonné de divagations académiques. Il ne lui avait donc pas échappé que si la France n’avait pas la puissance économique de l’Allemagne, elle n’en détenait pas moins certains attributs de puissance qui méritaient attention, et notamment la puissance stratégique. La rupture a-t-elle été telle en quinze ans, et particulièrement depuis 2007, que la France militaire aurait disparu du grand échiquier mondial décrit par notre auteur ?
Il est inutile de s’attarder sur la portée réelle du retour de la France dans la structure intégrée de l’otan, ses forces armées n’ayant pas attendu cette décision, de caractère strictement politique, pour apporter aux opérations de l’organisation jadis atlantique un concours particulièrement actif. Le seul problème qui mérite attention est de savoir si la France dispose encore en 2012 d’une capacité militaire qui, indépendamment de son appartenance à quelque organisation internationale que ce soit, lui permette de tenir son rang parmi les nations qui peuvent encore prétendre, dans le monde du xxie siècle, exercer une influence au-delà de leur immédiat environnement géographique. La question n’est pas anodine pour un pays membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies, et à ce titre plus particulièrement en charge, avec les quatre autres membres permanents, du maintien ou du rétablissement de la paix dans le monde. Elle ne l’est pas davantage pour le membre fondateur et pilier d’une organisation européenne aujourd’hui première puissance économique mondiale et cependant menacée de marginalisation sur une planète en pleine recomposition, faute d’accepter de se doter d’un statut d’objet politique clairement identifié.
Tenir son rang s’apprécie en termes de crédibilité internationale et tient à l’entrecroisement de certains vecteurs de puissance. Que la France, indépendamment de son appartenance à l’Union européenne, figure encore dans le peloton de tête des puissances économiques mondiales n’est pas accessoire. Que le réseau diplomatique et consulaire français soit l’un des premiers au monde n’est pas davantage un détail sans importance, tout comme le maillage très dense des établissements culturels français sur les cinq continents. Il n’est pas non plus secondaire pour l’image de la France dans le monde qu’elle y soit perçue, de concert avec le partenaire allemand, comme le concepteur et le moteur d’une construction européenne parvenue au faîte de la puissance économique. Et la qualité de détenteur d’un siège permanent au Conseil de sécurité n’est pas le moindre des attributs de puissance, mais qui ne serait, dans le monde tel qu’il est en ce début de xxie siècle, qu’une fiction s’il ne s’appuyait sur une capacité militaire reconnue par le plus grand nombre et en harmonie avec une diplomatie attachée à faire entendre la voix de la France là où se joue l’avenir du monde.
Or cette capacité a survécu malgré les féroces cures d’amaigrissement imposées à nos forces armées depuis un demi-siècle. Élément central de la défense du territoire national, la dissuasion nucléaire demeure telle qu’elle fut conçue à l’origine. La fin de la guerre froide a certes justifié des aménagements quant aux objectifs et aux moyens mis en œuvre, mais il ne fait aucun doute que dans le monde né de la disparition des deux blocs, l’arme nucléaire restera l’étalon de la puissance militaire tant que ses détenteurs ne jugeront pas possible, compte tenu de la persistance des risques de prolifération, de s’engager résolument dans la voie du désarmement nucléaire inscrit dans le traité de non-prolifération de 1968.
Jusque-là, la France n’a aucune raison de renoncer à cet élément majeur de sa sécurité. Mais être membre du club très fermé des puissances nucléaires ne suffirait pas à faire de l’armée française l’une des meilleures au monde si elle n’avait pas dans le même temps la capacité d’intervenir à tout moment sur les théâtres d’opérations extérieures, sur mandat des Nations Unies ou, plus rarement, par décision du gouvernement français. Les forces armées françaises restent, avec leurs homologues britanniques, les seules forces européennes projetables sur un théâtre extérieur dans un délai relativement bref. La crédibilité de la politique extérieure de la France est, pour une bonne part, à ce prix.
Il reste que ces interventions des forces françaises sur des théâtres d’opérations de plus en plus lointains et pour des durées de plus en plus longues s’effectuent aujourd’hui à flux de plus en plus tendus. Si le point de rupture devait un jour être atteint, c’est bien la position de la France sur la scène internationale qui se trouverait en question. Dans le monde compliqué de l’après-guerre froide, la puissance a un prix que la révision générale des politiques publiques (rgpp) ne connaît pas. Il y a là, dans un proche avenir, matière à réflexion et à débat au plus haut niveau de l’État.
“Almost as if according to some natural law, in every century there seems to emerge a country with the power, the will, and the intellectual and moral impetus to shape the entire international system in accordance with its own values. In the seventeenth century, France under Cardinal Richelieu introduced the modern approach to international relations, based on the nation-state and motivated by national interest as its ultimate purpose. In the eighteenth century, Great Britain elaborated the concept of the balance of power, which dominated European diplomacy for the next 200 years. In the nineteenth century, Metternich’s Austria reconstructed the Concert of Europe and Bismarck’s Germany dismantled it, reshaping European diplomacy into a cold-blooded game of power politics.”
This is how Henry Kissinger begins Diplomacy, his remarkable history of international relations during the past four centuries. All the same, when the historian attempts, based on these premises, to show how the entry into the picture of the United States of America in the 20th century dramatically changed the course of these relationships, the politician that he used to be has to concur. Kissinger contrasts the constant seeking for a balance of power—always fleeting—with a belief in an international order founded on democracy, free trade and international law. The fundamentals of international politics always lead back, to a greater or lesser extent, to the “cold-blooded game of power politics.”
And no-one is better placed to say so than the person whom Kissinger regards as the inventor of modern diplomacy. We should re-read these sentences from the chapter “The Power of the Prince” in Testament Politique by Duc de Richelieu, Grand Admiral of France and Prime Minister: “Power being one of the things most necessary for the grandeur of kings and the happiness of their government, those mainly responsible for conducting a State’s business are particularly obliged to omit nothing that could by this means help make their master, however great his authority, considered by everyone. Just as goodness is the object of love, power is the cause of fear, and it is certain that among all the principles able to move a State, fear, which is founded on esteem and on reverence for strength, is the one that most persuades everyone to do their duty. If this principle is very effective in respect of internal matters of States, it is no less so in respect of outside matters, the subjects and strangers seeing formidable power with the same eyes... A prince must be powerful in terms of his reputation, in terms of a reasonable number of warriors maintained continuously, a notable sum of money in his coffers to finance expenditure that will often serve when one is least thinking of it... in matters of State, he who has the power often has the right, and he who is weak can only with difficulty keep from being wrong in the opinion of the majority of the world.”
A few chapters further on, the eminent cardinal adds: “War is sometimes an inevitable evil... States need war at certain times to purge their evil humours, to recover what belongs to them, to avenge an insult whose impunity would encourage another, to protect their allies from oppression, to stop the advances and the pride of a conqueror, to forestall the evils which plainly threaten them and which there is no other way to escape, or finally for various other reasons.”
The evil appeared so inevitable to the cardinal’s contemporaries and successors that, for three centuries, the European standard for international relations was war, the crucible in which most European nations were forged. And yet, diplomacy was not relegated to a minor role. In a prescription foreshadowing Clausewitz, the cardinal had himself already pointed out: “to negotiate without ceasing, openly or secretly, and everywhere, even if it yields no immediate fruit and the expected one is not yet apparent, is absolutely necessary for the well-being of States.” This principle was applied to the letter during the five years leading up to the Peace of Westphalia, but there is no ignoring certain contradictory evidence. The fact is that the history of international relations is first and foremost a history of power, with the founding principle being the need, by peoples, for security. Among the many components of power, the military element becomes one of its major characteristics as soon as the State has reached adulthood and come to possess a monopoly of violence.
In a recently published work devoted to Power in the 21st century, Pierre Buhler reported that in the uk, starting from the 21st century, “the State functions are mainly military and geopolitical. Over seven centuries, the proportion of tax revenues devoted to the acquisition and use of armed force varied between 70% and 90%... Thus each growth in the State will have been the result of developments associated with war, with civil expenditure accounting for a significantly smaller share.” France’s monarchy did not develop along different lines.
Of all the States in Europe born out of the collapse of the dream of universal empire, France was probably, throughout the second millennium, the most bellicose, piling up a succession of victories and defeats that were often unforeseeable, without this harming the country’s reputation as a first-rank military power, at least until World War II. And, even then, the causes of the “strange defeat” in 1940 were as much political, economic and moral as military. Rarely in the country’s history had the gap been so great between a combat force designed overall to defend the country and diplomatic policy, tied up with building coalitions and “rear alliances” with countries at a distance. This brief mention should serve as a reminder of the extent to which, in a Europe that, for centuries, never lived in peace without being on the brink of war, a State’s power could survive only through the greatest consistency between its various components.
In France, that consistency was rudely challenged with the advent of the Cold War. In the decade following the end of World War II, France—which no longer had anything more than the appearance of a world power—saw its armed forces integrated into a multilateral organisation that it did not control, with the notable exception of the forces committed to fighting rearguard actions in a French Empire already coming to an end. At the same time, however, it opened up a new avenue that broke with centuries of European history. By laying the first stone of what was intended to produce unity of the continent, in collaboration with the previous enemy, France was sketching out the concept of power based on peace, and therefore on a possible renunciation of war among European nations. In the European imagination, this innovation could result in a diminished status, if not marginalisation, of power’s military component. Apart from that, in the depths of the Cold War, the new Europe could not turn a blind eye to the risks to which, if disarmed, it would be exposed in the face of the opposing bloc’s ambitions. Incidentally, the American protector would not have consented to it. Hence the timid attempt to construct a European Defence Community (edc). For at least 40 years, failure of the edc was to dissuade Europeans from seeking their salvation outside the Atlantic Alliance.
Only France failed to see it that way. When Charles de Gaulle had wiped out France’s colonial liability, unlike his European partners he chose to take advantage of the Cold War to restore prestige to the concept of France as a great power (“France cannot be France without grandeur.”). To achieve that, a clear political line had to be specified, and that was presented, after the event, in his Mémoires d’espoir: “My intention is therefore to withdraw France, not from the Atlantic Alliance, which I intend to maintain as an ultimate precaution, but from the integration produced by nato, under American command; to forge a relationship with each of the States in the Eastern bloc, and first of all with Russia, aiming at détente, and then entente and co-operation.” When the right moment came he would do the same with China. Finally, he aimed to give France a nuclear power that nobody would be able to attack without risking horrific injury. He wanted, however, to proceed along that road in measured steps, linking each step to general progress, while continuing to manage France’s traditional friendships.
In terms of power, the credibility of such a political aim depended on having military might that was able to defend the country, the absolute strategic priority in this respect being accorded to nuclear dissuasion. It also required being able to act in a co-ordinated fashion with nato forces despite French forces having left the integrated command structure. Lastly, it required being able to intervene alone if necessary in external theatres, which is to say basically in Africa; only there did France have the strategic depth making it worthy of being called a military power. The defence agreements with African governments and French bases were to provide for that. Absolutely essential to this defence policy was developing a defence industry geared to exports.
But what could be done in this situation of European constraint? As an economic power of world stature, the European Community did not aspire to the status of a great power, Following failure of the edc, France’s attempts to get its partners to join it in building a political Europe, taking charge of its defence, were to come up against the unshakeable confidence the partners accorded to nato and to the American nuclear umbrella, to whose haphazard nature they turned a blind eye. France therefore restricted itself to forging useful co-operation with Federal Germany, based on a Franco-German brigade and then the European corps, the improbable nucleus of a future European defence system, just in case!
The just-in-case situation emerged at the end of the Cold War. We can again leave the description to Kissinger, whose 1994 works states: “In the post-Cold War world, the various elements [of power: military, political and economic strength] are likely to grow more congruent and more symmetrical. The relative military power of the United States will gradually decline. The absence of a clear-cut adversary will produce domestic pressure to shift resources from defence to other priorities… When there is no longer a single threat and each country perceives its perils from its own national perspective, those societies which had nestled under American protection will feel compelled to assume greater responsibility for their own security. Thus, the operation of the new international system will move toward equilibrium even in the military field… The new order will be more like the European state system of the eighteenth and nineteenth centuries than the rigid patterns of the Cold War. It will contain at least six major powers—the United States, Europe, China, Japan, Russia and probably India”: a state system with which, Kissinger acknowledges, the United States had always been at odds.
The stunned American reaction to “9/11”, particularly in the military sphere, could have resulted in a return of hyper-power and the corresponding upsurges in hegemonic fever to the front of the international stage. In fact, nothing of the sort happened. In both Iraq and Afghanistan, the “Imperial Republic” was to encounter the limits to its power. Consequently, the world landscape which is being sketched out at the end of the first decade of the 21st century is approaching the one whose broad outlines, as if by premonition, the former Secretary of State traced out the some 15 years ago: a multi-polar world, broadly re-centred on Asia and the Pacific, but where Europe, greatly isolated at the western extremity of the Eurasian land mass, seems still to be unaware of the redistribution of power cards on the world scale, and to delight in playing the part of an economic giant and a political dwarf.
Given this situation, is there the least chance of, fairly shortly, seeing the European Union finally getting underway with constructing the Common Security and Defence Policy, written into the treaties over the past 20 years? For the moment, certainly not. No discussion on eu security can now be concluded in Brussels without explicit reference to nato. And this has become all the more natural since, like a prodigal son, France returned to the fold. No doubt even with inclusion in the Treaty of Lisbon of a “territorial defence clause”, for the States that are nato members, that organisation remains the basis for their collective defence and the institution to implement it. With France having returned to the integrated structure, the country’s defence is now unambiguously part of a great unanimity. Whether we are talking about defence of the home country or defence in remote territories, nato’s role remains central (as in Bosnia, Kosovo, Afghanistan, combating maritime piracy, and Libya), even though the European Union had succeeded by 2003 in drawing up a European Security Strategy. This enabled the eu to launch a number of crisis-management operations, generally of a more civil than military nature. It will, however, be difficult to go further, given the problems the 27 Member States have in finding a common vision of threats to European security and the routes and means that might be used to deal with them.
Should we conclude that, by returning to nato’s integrated command structure, France has given up, finally breaking after 40 years with the aim constantly asserted for the country’s power status by all of de Gaulle’s successors? Drawing on Zbigniew Brzezinski’s The Grand Chessboard: American Primacy and its Geostrategic Imperatives, Pierre Buhler’s book reports that in 1997 the former National Security Advisor was wondering about the usa’s ability to preserve its dominant positions in areas where control over world affairs was at stake, that is on the periphery of the Eurasian land mass. Brzezinski named the “active geostrategic players” on which Washington had to reckon: Russia and China, of course, but also France, Germany and India. What did he mean by an “active geostrategic player”? They were States that had “the capacity and the national will to exercise power or influence beyond their borders in order to alter, to a degree that affects American interests, the existing geopolitical state of affairs.” Having himself been directly involved, just like Kissinger, in us international politics, Brzezinski cannot be suspected of academic speculation. It will therefore not have escaped him that, while France lacked the economic power of Germany, the country nevertheless had certain attributes of power, and in particular strategic power, that deserved to be given attention. Has the break with the past been so dramatic in 15 years, and especially since 2007, that France as a military power has disappeared from the Grand Chessboard described by Brzezinski?
It is pointless to spend time speculating about the real extent of France’s return to nato’s integrated structure, the country’s armed forces not having awaited that—strictly political—decision to provide particularly active support to operations of the formerly-Atlantic-focused organisation. The only problem deserving attention is the question of whether, still in 2012, France has a military capability that, independently of membership of any international organisation whatsoever, allows the country to maintain its position among the nations that can claim influence beyond their immediate geographical area. This is not a trivial question for a country that is a permanent member of the United Nations Security Council and is (along with the other four permanent members), in that capacity, more particularly responsible for maintaining or re-establishing peace in the world. Nor is it trivial for the founding member and pillar of a European organisation that is now the world’s greatest economic power, and yet threatened by marginalisation amidst a wholesale global re-organisation, through having failed to accept and ensure possession of a clearly identified political objective.
Maintaining France’s position is to be understood in terms of international credibility, and implies remaining at the intersection of certain vectors of power. The fact that France, independently of its membership of the European Union, still appears among the frontrunners of world economic powers is not of secondary importance. Nor is the fact that France’s diplomatic and consular network is one of the world’s largest, just like the dense proliferation of French cultural establishments on all continents (except Antarctica). Nor is it of secondary importance for France’s world image that the country is perceived in those parts of the world, along with the German partner, as the designer of an engine driving construction of a Europe that has reached the summit of economic power. Also, the status of a permanent member of the Security Council is not the least of France’s trappings of power, even though, in this world in the early part of the 21st century, it would be little more than a fiction if it did not depend on military capabilities recognised by the majority, and in harmony with diplomatic policy concerned with ensuring France’s voice is heard wherever the world’s future is being played out.
This capability has survived in spite of the drastic weight-loss programmes imposed on our armed forces for half a century. As a central element in defending the national territory, nuclear dissuasion remains what it was when originally designed. Certainly, the end of the Cold War provided a justification for modifications in the objectives and in the means deployed, but there is no doubt that, in the world created by the disappearance of two opposing blocs, nuclear weapons will remain the standard by which military power will be judged. This will continue so long as the holders consider it impossible, in view of the persisting risk of proliferation, to wholeheartedly embrace the route of nuclear disarmament specified in the 1968 Non-Proliferation Treaty.
Until then, France has no reason to give up that major aspect of its security. Being a member of the very closed club of nuclear powers would not be sufficient, however, to make the French armed forces one of the best in the world if the country did not, at the same time, have the ability to intervene at any time in external theatres of operations, in accordance with a United Nations mandate or—more rarely—by a decision of the French government. France’s armed forces remain, with their British counterparts, the only forces in Europe that can be sent relatively quickly on external operations. The credibility of France’s foreign policy is, to a great extent, at this price.
The fact remains that such intervention by French forces in increasingly far-flung theatres of operations, for increasingly long periods, is now carried out increasingly on a just-in-time basis. If, one day, a clean break had to be achieved, France’s position on the international stage would be called into question. In the complicated post-Cold War world, power comes at a price undreamt of by France’s (2008) General Revision of Public Policies. This calls for reflection and discussion very shortly at the State’s highest levels.