Anne consulte la planification du mois à venir. Elle ne sera pas souvent chez elle et son astreinte au « bloc de réserve » laisse prévoir des modifications de dernière minute. Elle doit joindre sans tarder la « nounou » de sa fille pour s’organiser. De l’autre côté de Paris, Catherine, qui vient de déposer son fils à l’école, fait le point sur ses déplacements à venir. Chef de service, elle sera absente pendant près de trois semaines. Quant à Françoise, elle est d’astreinte pour un hôpital militaire. En ce dimanche soir, elle vient de coucher sa fille de quatre ans lorsque le centre opérationnel (cpco) la contacte : « Vous êtes attendue dans trois heures à l’aéroport de Villacoublay où un Falcon est affrété : des soldats français ont été grièvement touchés. » Dans la nuit, elle rassemble son paquetage, appelle sa famille en province, et part en mission, une mission non programmée qui, elle ne le sait pas encore, va durer un mois et demi. Anne est pilote de ligne, bientôt commandant de bord. Catherine dirige le département d’audit interne d’une multinationale. L’une et l’autre sont mères de famille. Le mari de Catherine, ingénieur des travaux publics, est actuellement chef de projet sur un chantier important à l’étranger. Anne, elle, est séparée de son compagnon qui ne supportait plus ses absences. Des situations exceptionnelles ? Non, la suite logique de la marche vers l’égalité dans le travail, les responsabilités et les rémunérations entre hommes et femmes dans la société occidentale.
L’armée française a pris le virage de la féminisation dans les années 1980, à l’époque où le service militaire était obligatoire et les opérations extérieures (opex) principalement dévolues aux unités professionnelles. La professionnalisation faisant son chemin et les quotas étant supprimés depuis 1998, les écoles d’officiers et de sous-officiers accueillent actuellement de plus en plus de femmes. Chaque armée s’est efforcée de médiatiser cette évolution en montrant combien elle était en phase avec la société française. On a vu fleurir dans les médias des portraits de femmes pilotes d’hélicoptère ou d’avion de chasse, d’officiers de quart à la passerelle ou de chefs de groupe. Pas de défilé du 14 juillet sans l’interview ciblée d’une femme sous l’uniforme, généralement pleine de charme.
Pourquoi alors s’interroger sur le « être mère » et non le « être père et opérationnel » ?
Existe-t-il une spécificité de la maternité et de la paternité en milieu militaire ? La question se situe plus dans la singularité du lien aux enfants pour chaque parent et les conséquences psychiques d’un départ en mission pour les plus jeunes.
Après un état des lieux sur la place des femmes dans les armées, nous avons choisi de développer les enjeux de la séparation mère/enfant à l’occasion d’une opération extérieure afin de comprendre ce qui peut être source de souffrance d’un côté comme de l’autre. Il s’agit d’ouvrir une réflexion utile aux différents acteurs en charge des ressources humaines, souvent confrontés à une difficile équation à résoudre.
- Une évolution sociologique à ne pas méconnaître
Aujourd’hui, l’armée française est une armée professionnelle avec un taux de féminisation qui atteignit 15 % en 2009 – 21 % dans l’armée de l’air et plus de 50 % dans le service de santé des armées1. Cela fait de l’armée française l’une des plus féminisées d’Europe. Les femmes sont plus nombreuses au sein des catégories hiérarchiques les moins élevées. Elles sont plus jeunes proportionnellement. Les trois quarts d’entre elles vivent en couple. 55 % des militaires sont parents avant trente-cinq ans et, à quarante-cinq ans, huit femmes sur dix sont mères.
Les femmes sont désormais présentes dans presque tous les corps de métiers et spécialités, y compris dans les armes de « contact » ou l’aviation de combat. Ainsi, le taux de féminisation en opération extérieure (opex) ou sur les bâtiments de la Marine nationale se situe dans la durée autour de 5 %. Seules exceptions : les emplois combattants au sein de la Légion étrangère, les équipages de sous-marins et les postes de sous-officier au sein des escadrons de la gendarmerie mobile. À noter que la marine des États-Unis d’Amérique vient d’ouvrir aux femmes des postes opérationnels dans les sous-marins.
- La disponibilité opérationnelle
Le service de santé des armées a été un pionnier dans le domaine de la féminisation. Historiquement, il faut rappeler que les convoyeuses de l’air s’engageaient à ne pas avoir d’enfant afin d’être disponibles en tout temps et en tout lieu. Les récits de Geneviève de Galard en Indochine dévoilent la place de la femme soignante auprès des soldats. Pour ceux-ci, « Geneviève » était un peu la mère, un peu la sœur, un peu l’amie, la confidente ; sa seule présence rendant moins inhumain cet enfer de feu, de boue et de sang. Sa place, elle ne l’a cédée à personne. La peur ? Pas le temps ! L’angoisse de la mort ? L’imaginaire collectif déploie alors ses interrogations. Comment une femme qui donne la vie peut-elle gérer la violence ambiante, la menace de mort voire la mort donnée pour protéger sa vie, celle des autres ou simplement remplir la mission qui lui est confiée ? Chacune, comme chacun, y répond avec son histoire, son environnement socio familial, sa personnalité et les déterminants de sa motivation professionnelle.
Mais en amont de ces questions se pose celle toute simple de la disponibilité opérationnelle quand on est soldat et mère de jeunes enfants. En couple pour moitié d’entre elles, les femmes militaires s’efforcent de concilier vie de famille et activité professionnelle d’où la recherche, dans certains cas, d’emplois stables, aux horaires calibrés. Mais les mères de famille engagées au titre d’une spécialité projetable doivent trouver à organiser leur vie en fonction des relèves. Beaucoup planifient leurs grossesses en fonction des postes qu’elles occupent. Certaines, mères de très jeunes enfants, sont parfois amenées à refuser des départs en mission. C’est un constat avéré dans le service de santé des armées. Les missions de six mois dans des fob (Forward Operating Bases) ou des cop (Combat Outpost) exigent une préparation intensive qui double le temps d’absence. Le Quotidien du médecin a publié récemment une enquête sur les médecins militaires français en Afghanistan2. Voici des extraits de leurs témoignages :
« Nous observons une raréfaction du nombre des médecins disponibles, conséquence de la féminisation du service. La pression se fait sentir d’autant plus sur les médecins hommes. Maintenant, si pour remplir ma mission de médecin militaire, je dois exposer ma vie et être tué, il faut l’accepter par avance. Sans être une tête brûlée, cela fait partie du contrat à honorer. » « Pour éviter de se retrouver en Afghanistan, certains mettent en avant des problèmes de conjugopathie, ainsi que des soucis liés aux enfants. Mais cela ne fait que repousser le départ de quelque temps. D’autres se font mettre en congé de maladie. Deux cas de démission ont aussi été évoqués. »
« Le problème le plus massif découle de la féminisation du ssa (service de santé des armées). Ceux d’entre nous qui partent en omlt (Operational Monitoring Liaison Team) sont susceptibles d’être intégrés à l’armée afghane et les femmes en sont exclues. D’autre part, dans les missions de gtia (groupement tactique interarmes), assez physiques, les femmes sont peu nombreuses. On ne sollicite donc, principalement, que le vivier masculin. Et ce sont toujours les mêmes qui s’y collent. Cela crée un problème, sur lequel nous avions alerté la direction centrale il y a dix ans, en demandant l’instauration de quotas, ou d’épreuves de sélection physique au concours. »
Ces témoignages pointent un vécu de colère face à une réalité : les mères de jeunes enfants sont moins opérationnelles. Leur nombre grandissant pose des problèmes de disponibilité en termes de ressource humaine. Néanmoins, il est essentiel de ne pas stigmatiser les femmes dans l’armée, de ne pas laisser croire que leur sexe leur offrirait une position d’exception qui les épargnerait des contraintes opérationnelles, mais plutôt de prendre en compte et d’accepter les spécificités médico-psychologiques liées à la maternité. Il y aurait en effet un risque à se limiter à une vision purement comptable, aux tableaux des effectifs des personnels projetables et à s’inscrire dans la « peur de la petite différence » qui pourrait susciter des points de tension, voire d’exclusion.
Le « narcissisme des petites différences » est un concept utilisé par Sigmund Freud dans Malaise dans la civilisation pour expliquer les oppositions qui surgissent entre des individus ou des groupes que les tiers considèrent comme identiques ou similaires. La théorie freudienne nous instruit sur le besoin que nous avons de catégoriser rigidement tel ou tel groupe d’individus en les regardant comme des êtres différents qu’il devient « nécessaire » d’exclure. Le président Bush, qui a tenté de tenir éloignées des combats les deux cent mille femmes en uniforme, s’est attiré les foudres de nombre d’associations et de parlementaires féministes pour qui l’armée, une conquête des femmes, reste « le seul employeur à pratiquer une discrimination en fonction du sexe ».
Et pourtant, selon une dépêche de l’afp en date du 15 octobre 2010 : « L’armée de terre américaine est en train de tester pour la première fois un nouvel uniforme de combat féminin pour habiller “de façon plus respectueuse de leur morphologie” les quelque cent soixante mille femmes qu’elle compte dans ses rangs (14 % des forces de l’armée de terre…) avec notamment “davantage de tissu pour accommoder le derrière”. […] Par rapport aux lignes rustiques de la version masculine, la tenue féminine arbore une taille creusée de plusieurs centimètres, une veste qui couvre les hanches, et des soufflets dans le dos qui donnent de l’espace au buste. Un élastique à la taille remplace un spartiate cordon, les épaules ne tombent plus près du coude et l’entrejambe est raccourci. » Cinq ans d’études ont été nécessaires pour concevoir cet uniforme, l’acu (Army Combat Uniform) au féminin, alors que des tenues militaires de maternité sont déjà en service.
Alors, comment concilier les points de vue, comment arriver à une acceptation des différences puisque la féminisation des armées occidentales est aujourd’hui un fait et même une nécessité pour répondre aux besoins en termes de ressources humaines ? Le regard du médecin psychiatre sur la relation entre la mère et l’enfant permettra peut-être de mieux comprendre les difficultés, les enjeux et de ne pas évacuer les problèmes de façon trop simpliste.
- La séparation mère/enfant : point de vue psychologique
Dire que le fait d’être mère n’influence pas la disponibilité opérationnelle des femmes relève d’une méconnaissance profonde des mécanismes psychiques à l’œuvre et tient davantage d’une idéologie réductrice. Recruter et former des femmes dans l’armée n’a rien d’anodin, et a obligatoirement des conséquences dans l’organisation et la capacité de projection des forces. C’est une réalité vérifiée au quotidien dans les unités opérationnelles, c’est aussi une observation médicale. Psychiatres, pédiatres et psychanalystes n’ont pas attendu l’époque contemporaine où les femmes s’engagent en masse pour se préoccuper de la question de la séparation entre les jeunes enfants et leur mère. Les conséquences psychiques d’une séparation trop longue ou trop brutale sont bien connues et ont donné lieu à des écrits très élaborés3.
La capacité qu’a le petit enfant d’être séparé de sa mère se développe pas à pas durant les premières années de vie. Il apprend d’abord à connaître sa mère et à lui faire confiance. Il expérimente ensuite le fait d’être seul en sa présence (elle n’est pas loin, dans la pièce voisine). Ces absences doivent être progressives et permettre à l’enfant de développer l’aptitude à jouer seul, à rêver, à imaginer sa mère, même absente. C’est dans cet environnement optimal, ni trop distant ni trop serré, que l’enfant va découvrir sa vie personnelle. Par la suite, l’individu devient capable de renoncer à la présence effective de sa mère. Les frustrations doivent être ajustées. La mère, si elle est en bonne santé (mentale et physique), saura répondre ni trop tôt ni trop tard aux appels de l’enfant. Si ces premières expériences frustrantes sont trop longues ou brutales, l’enfant peut manifester des difficultés à s’autonomiser et des troubles anxieux durables. La figure maternelle, aidée par son entourage, a un rôle primordial dans le développement harmonieux de la personnalité de l’enfant ; de plus, elle soutient, confirme l’autorité du père.
Outre les conséquences négatives d’un éloignement trop long ou trop brutal pour l’enfant, il existe aussi des conséquences pour la mère. Les efforts d’adaptation psychiques que doit fournir celle-ci pour se séparer de son enfant influent nécessairement sur sa disponibilité opérationnelle, sur son efficacité et sur sa résistance au stress. Évidemment, il existe des femmes exceptionnelles, aventurières, humanitaires ou guerrières légendaires, qui ont suscité l’admiration. Il ne s’agit pas ici d’évoquer ces êtres d’exception, mais de s’intéresser à celles qui présentent des aptitudes ordinaires en matière de courage, de capacités éducatives et affectives.
Donald Woods Winnicott, pédiatre et psychanalyste anglais, a décrit en 1956 sous le vocable de « préoccupation maternelle primaire » cette phase spécifique qui permet à la mère de s’adapter aux besoins de son enfant4. Ses conceptions n’ont pas été remises en question. Cette étape biologique et psychique particulière consiste en un repli nécessaire sur le jeune enfant. La mère ne quitte cette phase que très progressivement, mois après mois. Elle relâche son attention de manière imperceptible, à mesure que son enfant grandit, au plus près de ses progrès.
A contrario, chez une femme qui exerce un métier très opérationnel ou très « masculin », cette phase peut être difficile à vivre pleinement. Se trouvant tiraillée entre ses contraintes professionnelles et cet attachement particulier, elle peut développer des symptômes psychologiques insidieux qui l’empêchent d’être pleinement engagée dans sa mission. De plus, au lieu de récolter les bénéfices d’un maternage précoce et suffisant, elle risque, au fil des années, de devoir faire face aux troubles anxieux et comportementaux de son enfant, ce qui aura aussi des répercussions à long terme en matière de disponibilité opérationnelle.
Aussi, sans remettre en question l’engagement des mères, et donc des femmes, dans l’armée, il convient d’être attentif aux spécificités de la relation mère/jeune enfant, sans idéologie ni parti pris. En ne tenant pas compte de ces aspects psychologiques « ordinaires », de graves difficultés peuvent apparaître à la fois au sein des familles de militaires, mais aussi dans la réalisation de la mission. Bien sûr, ces propos peuvent toujours donner lieu à polémiques et critiques : « Qu’en est-il du père ? » « Est-il si “inutile” qu’il peut partir en opex sans conséquences pour lui ou pour son jeune enfant ? »
Il est effectivement des situations exceptionnelles, mais réelles, où le père constitue la véritable figure maternelle pour l’enfant. Dans ces situations, son départ peut s’avérer tout aussi problématique. Il est également des situations où la mère, privée du soutien de son conjoint, aura des difficultés à exercer suffisamment son rôle maternant au plus près du petit enfant. Si le père s’absente pour des raisons professionnelles, le reste de la famille ou l’entourage social devra alors se substituer à lui pour assurer cet étayage rassurant.
Tout comme nous avons décrit chez l’individu la notion de « base interne de sécurité », nous pouvons parler pour une famille de « base familiale de sécurité ». Ce terme a été décrit par le professeur M. Delage, ancien chef du service de psychiatrie de l’hia Sainte-Anne à Toulon5. Ce médecin s’est intéressé à l’influence des événements traumatiques et difficiles sur le système familial dans son ensemble. Ainsi explique-t-il qu’il existe des facteurs de vulnérabilité et des facteurs de protection au sein de chaque famille. Chacune va réagir de manière différente selon ses croyances, son histoire, ses capacités d’ouverture et de communication. Pour lui, une famille comprenant des enfants en bas âge est nécessairement centrée sur elle-même. Les liens intrafamiliaux y sont forcément très resserrés du fait des besoins de protection du système mère/enfant. C’est une étape normale.
Le départ d’une jeune mère en opération va donc représenter un bouleversement pour tout le système familial. Ce bouleversement sera d’autant mieux compensé que cette famille disposera d’une bonne « base de sécurité » en termes de ressources psychique, familiale et de capacité de communication. Une famille qui ne dispose d’aucune ressource extérieure et qui est déjà fragilisée au plan psychologique pour diverses raisons aura du mal à contenir et à réagir à cette absence.
Le départ d’une jeune mère (et c’est une situation fréquente actuellement) soulève donc des problématiques spécifiques que l’institution militaire, en recrutant des femmes, ne doit pas méconnaître. Quelles peuvent être alors les mesures de prévention, de préparation, et de soutien pour éviter les désadaptations brutales ou insidieuses ?
- Le départ des mères en opex : comment y réfléchir ?
Sans se substituer au commandement, il est permis de l’inciter à réfléchir à un certain nombre de questions pragmatiques :
- en quelle proportion pouvons-nous recruter des femmes ?
- comment les répartir, dans quelles unités et pour quelles missions ?
- y a-t-il des périodes de la vie familiale incompatibles avec le départ d’une femme en opex ?
- le cas échéant, quelles mesures d’accompagnement social, familial et éventuellement psychologique doit-on mettre en place ?
- cet accompagnement doit-il avoir lieu avant, pendant et après la mission ?
- quel coût cela peut-il avoir pour l’institution, sachant qu’il s’agit du coût en situation optimale, si tout se passe bien, mais aussi du coût en cas d’émergence de troubles de l’adaptation à plus ou moins long terme ?
Précisons d’emblée que l’« aptitude opérationnelle des mères » dans les armées ne relève pas des compétences des psychiatres. C’est en théorie un choix fait en s’engageant, un choix qui se prépare avec des outils, des aides psycho-sociales. Il existe déjà des mesures de soutien aux familles de militaires avant les départs en opérations extérieures. Les cellules d’aide aux familles (caf) dans les unités ou dans les états-majors (notamment la cabat, cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre, et la cabmf-air, cellule d’aide aux blessés, malades et familles de l’armée de l’air) sont des lieux de solidarité et d’information avant et pendant les missions. Les assistants sociaux participent à ce dispositif et peuvent intervenir à tout moment en cas de détresses particulières au cours des missions extérieures. Ces dispositifs généraux sont indispensables et doivent s’adapter aux risques très particuliers liés à des séparations entre les mères et leurs jeunes enfants. Leur niveau de réactivité va conditionner l’avenir de ces familles en cas de difficultés matérielles ou éducatives au cours d’une mission. Sans ce soutien social, une famille en souffrance, même si elle est aidée par le médecin d’unité ou par un psychologue, peut avoir un vécu d’abandon qui se surajoute à celui de la séparation.
Il ne s’agit donc pas d’établir des discriminations entre hommes et femmes ou entre femmes sans enfant et mère, mais de réfléchir à une problématique incontournable. Si cette réflexion n’est pas menée, les intervenants (commandants et médecins d’unité, assistants sociaux, cadres de contact) risquent de gérer en urgence, seuls, sans concertation ni élaboration, des situations parfois graves. Souvent, le simple fait de se pencher sur une problématique familiale ou sociale, grâce à une écoute bienveillante et respectueuse de l’intimité, permet de désamorcer les tensions qui compromettent la santé des individus et la réussite de la mission. L’évaluation de ces situations de séparation doit se faire bien en amont de la mission, sans attitude de méfiance ou de discrimination, mais dans un climat de confidentialité et de respect qui, à lui seul, peut permettre des départs réussis et un accomplissement professionnel satisfaisant.
Il s’agit de proposer de l’aide à travers un temps d’entretien avec la personne concernée. Sans dramatiser ni banaliser, le fait de prendre en compte la spécificité de ces situations permet souvent à la jeune mère de se désister plus facilement, sans culpabilité ni sentiment d’échec, ou au contraire de conforter une forte motivation à un départ avec, en plus, le sentiment d’avoir été écoutée.
Voici des paramètres importants que le commandant d’unité peut évaluer à travers un entretien :
- la motivation : si, par exemple, celle-ci est exclusivement financière, elle ne résistera pas aux contraintes représentées par la mission – dangerosité, stress, fatigue, efforts d’adaptation à la situation de séparation avec le jeune enfant pour les raisons citées plus haut. De même, la volonté affichée de prouver sa bonne volonté ou sa solidarité à l’égard du groupe doit attirer l’attention du commandement. Ces mères, jeunes voire très jeunes, veulent « faire leurs preuves », d’autant plus qu’elles sont des femmes. Certaines sont prêtes à accepter des départs uniquement pour montrer leur « force ». Les critiques plus ou moins explicites à leur égard les renforcent dans leur souhait de montrer leur détermination et leur courage, surtout si elles reviennent d’une longue absence en congé maternité. Parfois, leur départ fait suite à celui de leur époux, militaire lui aussi, ce qui introduit encore plus de discontinuité dans les soins apportés à l’enfant et dans la solidité des liens familiaux. Ces départs aux motivations fragiles sont source d’une grande précarité familiale et annoncent souvent une rapide désadaptation pendant ou à la fin de la mission (arrêts maladie, congés de longue durée, réformes…),
- la qualité de l’entourage élargi : quelle sera la disponibilité du père et quelle est sa position vis-à-vis des soins et du maternage ? Est-il habitué à s’occuper du jeune enfant ? Où vit le reste de la famille, quelle est sa disponibilité, y a-t-il déjà un projet familial autour de l’absence de la jeune mère ? La mère a-t-elle confiance dans ce dispositif ?
- la famille invitée à prendre contact avec le service social de l’unité : l’assistante sociale peut également mettre en place des aides avant le départ en cas d’insuffisance dans l’environnement de l’enfant. Ceci peut rassurer la mère et l’enfant puisque les difficultés auront été préalablement identifiées et prises en compte avant toute crise,
- l’existence de problèmes spécifiques : maladie grave chez l’enfant, séparation en cours avec le père, situation de mère célibataire,
- l’après-congé de maternité : comment cette jeune mère est-elle revenue à son poste après sa grossesse et comment s’est-elle de nouveau adaptée aux contraintes de son métier au sein de l’unité, en condition de paix et hors contraintes opérationnelles ? Si des difficultés durables, répétées, en termes de résistance au stress et de disponibilité, ont déjà émergé, la question d’un départ en opération extérieure doit être rigoureusement étudiée.
- Une difficile équation
Si certaines spécialités militaires restent interdites aux femmes pour des raisons physiques ou de contexte psychologique que l’on peut aisément comprendre, d’autres sont devenues des domaines où celles-ci sont majoritaires (60 % de réussite au concours d’entrée à l’École de santé des armées). Dans le même temps, l’armée française a vu ses effectifs considérablement réduits et les opex se multiplier avec des engagements de plus en plus violents, au point que l’on s’est remis à parler de « guerre ». Il n’était pas pensable que le service de santé tienne ses personnels féminins à l’écart des engagements armés, même les plus violents. Il en allait de sa crédibilité et de son avenir. Dire que cela n’a pas posé quelques problèmes de gestion des personnels serait trahir la réalité.
Si l’époque du service militaire obligatoire et du face-à-face otan-Pacte de Varsovie permettait d’envisager des carrières hospitalières ou de médecin d’unité ou hospitalières dans les seules garnisons françaises ou allemandes, la réalité est tout autre aujourd’hui. La projection est la règle, la confrontation à la violence et à la mort incontournable. Aucune candidate à un concours ou à un poste dans le service de santé ne peut désormais l’ignorer. Elle a choisi, comme les hommes, le métier des armes, même si c’est pour y apporter soulagement et soins. Le stage obligatoire de préparation aux opex, avec son programme d’entraînement au maniement de l’arme et au tir, est d’ailleurs sans ambiguïté dans ce domaine.
Ce choix, d’autres femmes le font en toute liberté pour servir dans des unités de combat, d’appui ou de soutien. Au cours de la formation initiale ou dans les écoles, la finalité du métier des armes n’est en effet en rien éludée. Pour certaines d’entre elles, en contrat à durée déterminée, le passage dans les armées sera une première expérience professionnelle sans incidence sur leur vie privée et familiale. Celles qui poursuivront dans la carrière devront, comme Françoise, Anne et Catherine, concilier vie familiale, maternité et vie professionnelle en se souvenant que leur choix était délibéré et effectué en toute connaissance de cause.
Le statut de fonctionnaire offre aux hommes et aux femmes une stricte égalité de salaire à responsabilité égale en termes de droits, mais il implique aussi le devoir de remplir les mêmes missions dans sa spécialité ou son expertise. C’est en témoignant par leurs actes de leur disponibilité, de leur capacité et de leur efficacité professionnelles, et non en invoquant une quelconque spécificité de statut, un droit à un traitement différent que les femmes militaires s’imposeront dans un univers encore trop machiste.
A contrario, l’institution militaire doit cesser de présenter ses personnels féminins comme des « exceptions » posant problème. L’armée française, comme toutes les armées occidentales, est confrontée aux questions de recrutement et de fidélisation. Elle ne peut pas se permettre de négliger la ressource féminine, mais doit prendre les mesures pragmatiques qui lui permettront de la pérenniser.
1 Carine Le Page, Jérôme Bensoussan, Les Militaires et leurs familles, sga/spac/pgt, juin 2010.
2 « L’engagement du service de santé des armées en Afghanistan. Les médecins militaires face à la prise de risque », Le Quotidien du médecin, 26 octobre 2010, pp. 8-9.
3 D. W. Winnicott, La Mère suffisamment bonne (Paris, pbp, 2006) ; J. Bowlby, Attachement et perte (3 vol., Paris, puf, 1978) ; S. Lebovici, S. Stoléru, Le Nourrisson, sa Mère et le Psychanalyste : les interactions précoces (2003) ; A. Freud, Le Normal et le Pathologique chez l’enfant (traduit par le Dr Daniel Widl…cher, Paris, Gallimard, 1968) ; M. Klein, La Psychanalyse des enfants (Paris, puf, 2009).
4 D.W. Winnicott, La Mère suffisamment bonne, Paris, pbp, 2006.
5 M. Delage, « Répercussions familiales du traumatisme psychique », Stress et trauma, 1 (4), 2001, pp. 203-211.
1 Carine Le Page, Jérôme Bensoussan, Les Militaires et leurs familles, sga/spac/pgt, juin 2010.
2 « L’engagement du service de santé des armées en Afghanistan. Les médecins militaires face à la prise de risque », Le Quotidien du médecin, 26 octobre 2010, pp. 8-9.
3 D. W. Winnicott, La Mère suffisamment bonne (Paris, pbp, 2006) ; J. Bowlby, Attachement et perte (3 vol., Paris, puf, 1978) ; S. Lebovici, S. Stoléru, Le Nourrisson, sa Mère et le Psychanalyste : les interactions précoces (2003) ; A. Freud, Le Normal et le Pathologique chez l’enfant (traduit par le Dr Daniel Widl…cher, Paris, Gallimard, 1968) ; M. Klein, La Psychanalyse des enfants (Paris, puf, 2009).
4 D.W. Winnicott, La Mère suffisamment bonne, Paris, pbp, 2006.
5 M. Delage, « Répercussions familiales du traumatisme psychique », Stress et trauma, 1 (4), 2001, pp. 203-211.
1 Carine Le Page, Jérôme Bensoussan, Les Militaires et leurs familles, sga/spac/pgt, juin 2010.
2 « L’engagement du service de santé des armées en Afghanistan. Les médecins militaires face à la prise de risque », Le Quotidien du médecin, 26 octobre 2010, pp. 8-9.
3 D. W. Winnicott, La Mère suffisamment bonne (Paris, pbp, 2006) ; J. Bowlby, Attachement et perte (3 vol., Paris, puf, 1978) ; S. Lebovici, S. Stoléru, Le Nourrisson, sa Mère et le Psychanalyste : les interactions précoces (2003) ; A. Freud, Le Normal et le Pathologique chez l’enfant (traduit par le Dr Daniel Widl…cher, Paris, Gallimard, 1968) ; M. Klein, La Psychanalyse des enfants (Paris, puf, 2009).
4 D.W. Winnicott, La Mère suffisamment bonne, Paris, pbp, 2006.
5 M. Delage, « Répercussions familiales du traumatisme psychique », Stress et trauma, 1 (4), 2001, pp. 203-211.
Anne looks at the planning schedule for the month ahead. She won’t often be at home, and her on-call duties in the “reserve” operating theatre allow last-minute changes to be incorporated. She has to go immediately and see her daughter’s nanny, to get things sorted out. On the other side of Paris, Catherine has just taken her son to school and is checking through the times she will be away. She is a Head of Department, and will be away for virtually all of three weeks. As for Françoise, she is on call for a military hospital, and this Sunday evening she has just put her four-year-old daughter to bed when the Operational Centre contacts her: “You are expected in three hours’ time at Villacoublay airport, where a Falcon has been chartered. There are French military personnel who have been seriously injured.” During the night, she gets her kit together, calls her family, who live in the provinces, and leaves for the mission, which wasn’t scheduled and – though she doesn’t yet know it – will last a month and a half. Anne is an airline pilot and will soon be a captain, while Catherine manages a multinational’s internal audit department. All three have children. Catherine’s husband is a public works engineer, and currently project leader at a large site abroad. Anne is separated from her partner, who could no longer put up with her being away. Are these exceptional situations? No: they are just the logical result of the process towards equality at work, in responsibilities and in incomes between men and women in Western society.
France’s armed forces started recruiting women in the 1980s, when military service was compulsory and External Operations (“opexs”) were mainly assigned to wholly professional units. With professionalisation underway and quotas abolished from 1998, the officers’ and sub-officers’ schools are now receiving more and more women. Each branch of the armed forces strove to gain publicity for this change by showing how much they were in tune with French society. You could see a proliferation of pictures in the media, showing women helicopter and fighter pilots, ships’ officers of the watch on the bridge, and group principals. The national day of 14 July never passed without an interview targeting a woman – generally something of a looker – in uniform.
Why, then, do we question the idea of being a mother, when we don’t question deploying fathers on military operations? Is there a specific difference between motherhood and fatherhood in a military context? The question lies more in the unusual nature of a child’s relationship with each parent and the psychological consequences for the youngest when a parent goes away on a mission.
After reviewing the situation regarding women’s position in the armed forces, we have chosen to look further into the implications of mother-child separation in the course of an External Operation, in order to understand what sources of distress there may be on each side. We are beginning a reflection that will be useful for the various parties with responsibility for human resources, who are often confronted with the need for difficult balancing acts.
- A sociological change not to be misjudged
France’s armed forces are now wholly professional, with the female component reaching 15% in 2009. Women account for 21% of air-force personnel and over 50% in the forces’ health departments1. This makes the French forces one of the most feminine in Europe. Women are more numerous in the lowest ranks of the hierarchy and, overall, they are younger. Three-quarters of them live with a partner. Some 55% of military personnel are parents before the age of 35, and by 45 eight women out of 10 are mothers.
Women are now to be found in nearly all the divisions and specialities, including “contact” forces and fighter aircraft. This has resulted in the proportion of women on opexs or long-term on ships of the French navy being around 5%. The only exceptions are employment as fighters in the Foreign Legion, in submarine crews and positions as sub-officers in gendarme platoons. It should be noted that the US navy has just opened operational positions in submarines to women.
- Operational availability
The armed forces’ health service was a pioneer in accepting women. It should be remembered that, historically, France’s specialist air-evacuation nurses undertook not to have children, in order to be available at any time and anywhere. Geneviève de Galard’s account from Indochina revealed the role that female nurses played when dealing with the soldiers. For the latter, Geneviève was, at the same time, partly their mother, a sister, a friend and a confidante, her presence alone bringing some humanity into that hell of fire, mud and blood. She wouldn’t hand it over to anyone else. What about the fear? There simply wasn’t time! The anxiety and death? Collective imagination suggests these questions. How can a woman, and thus a life-giver, put up with the ubiquitous violence, the threat of death, and even killing to protect one’s own life and the lives of others, or simply to fulfil the mission entrusted to that person? Each person, whether woman or man, responds according to a personal history, social and family milieu, personality and occupational motivations.
Behind these questions, however, lies the very simple one of operational availability if you are a soldier and a mother of young children. With half of them living with a partner, women in the military endeavour to reconcile family life with their professional activities, which is why, in some cases, they look for a stable job with predictable hours. Women with a family who are contracted to a speciality where they are liable to be sent on a mission have to find a way of organising their lives in terms of those relief duties. Many of them plan their pregnancies in terms of the positions they occupy. Some – those with very young children – sometimes refuse to go away on missions. That is clearly observed in the armed-forces health service. Six-month missions at Forward Operating Bases or Combat Outposts demand intensive preparation, which dramatically increases the time away. The Quotidien du Médecin daily newspaper recently published the results from a survey of French military doctors in Afghanistan2. Some extracts from respondents’ accounts are given below.
“We can see a reduction in the number of doctors available, resulting from the increasingly female staffing. Pressure is being felt increasingly by the male doctors. If, in order to carry out my duty as a military doctor, I have to put my life at risk, I now have to accept in advance that I may be killed. While not being a hothead, that is part of the contract we have to honour... To avoid finding yourself in Afghanistan, some people focus on problems within the couple, together with worries about the children. But all that does is to push back the departure date a bit. Other people get themselves discharged on sick leave. Two cases where people resigned were also mentioned.”
“The greatest problem results from the increasing reliance on women in the armed forces health service. Those of us who leave as part of an Operational Monitoring Liaison Team are liable to be incorporated into a unit of the Afghan army, from which women are excluded. In addition, during Inter-force Tactical Group missions, where the requirements are quite physical, there are not many women. People therefore mainly call on the male contingent. And it is always the same people who get on with it. This creates a problem, to which we alerted central management 10 years ago, when we asked for quotas to be instituted, or else physical tests to be included in the selection competition.”
These accounts testify to the anger experienced in the face of a reality: the mothers of young children are less often operational. Their growing number presents problems of availability, in terms of human-resource management. It is nevertheless essential not to stigmatise women in the armed forces and to let it be thought that their sex puts them in an exceptional position that frees them from operational obligations. Rather, what is needed is for the specific medical and psychological features of motherhood to be taken into account and accepted. There would, indeed, by a danger in only taking a bean-counting approach, looking at personnel numbers available to be sent on missions and getting bogged down in a fear of the “small difference” that could arouse tension, and even lead to exclusion.
Sigmund Freud used the concept of “narcissism of small differences”, in his Civilisation and its Discontents, to explain features that complete outsiders would see as barely noticeable but which become emphasised to distinguish certain individuals and/or groups. Freudian theory tells us about our need to rigidly categorise various groups of individuals by considering them as different beings, whom it becomes “necessary” to exclude. President Bush tried to keep the 200,000 women in uniform away from active fighting, bringing himself under attack from lots of feminist associations and politicians, for whom the armed forces, a bastion that women had conquered, remained “the only employer to practise sex discrimination”.
And yet a story reported by afp on 15 October 2010 said: “The US army is testing its first-ever combat uniform expressly designed to fit the female figure ... to make 160,000 women soldiers more comfortable.” That is 14% of the total personnel. In particular, there will be “more material to accommodate the buttocks.” Compared with the straightforward lines of the men’s version, the female uniform has a few centimetres’ indentation at the waist, lengthening of the coat over the hips, and vents in the back providing space for the bust. An elastic waistband replaces the trouser drawstring, and unneeded material is removed from the shoulders and crotch. It took five years’ study to design the female Army Combat Uniform, whereas there was already maternity-wear for women soldiers.
So how can the various perspectives be reconciled, to end up with acceptance of the differences, given that the entry of women into Western armed forces is a fact, and even a necessity to meet the human-resource needs? Perhaps the viewpoint of a psychiatrist on mother-child relationships will give us a better understanding of the difficulties and issues at stake, so that we do not dismiss the problems in too simplistic a manner.
- Mother-child separation: a psychological perspective
Saying that being a mother does not affect women’s operational availability reflects a profound misunderstanding of the psychological processes at work, resulting more from simplistic thinking. Recruiting and training women for the armed forces is by no means a straightforward matter, and necessarily has implications for the way the military is organised, and for its ability to send personnel on missions. That reality is confirmed on an everyday basis in operational units, and is also observed medically. Psychiatrists, paediatricians and psychoanalysts were worrying about the issue of young children being separated from their mothers long before our contemporary experience of mass enlistment by women. The psychological consequences of a separation that is too long or too sharp are well known and have resulted in very detailed analyses being written3.
Small children’s ability to tolerate separation from their mothers develops bit by bit during their first years. They first learn to recognise their mothers and begin to trust them. They then experience being alone, while the mother is nearby, in the next room or briefly out shopping, etc. The absences should be progressive, and allow the child to develop the ability to play by him- or herself, to dream, and to think about the mother, even when she is not physically present. This is an ideal scenario for a child to find out about his or her own life, with the relationship neither too distant nor too close. The children then become able to do without the mother’s actual presence and should be able to manage their frustrations. If the mother is in good (mental and physical) health, she will be able to respond neither too soon nor too late to her child’s cries. If these first experiences of frustration are too long or too sharp, the child may show difficulty in gaining independence and experience lasting anxiety problems. Assisted by the people around her, the mother figure has a fundamental role to play in harmonious development of the child’s personality. In addition, she supports and confirms the father’s authority.
Apart from the adverse consequences for the child of too long or too sharp a separation, there are also consequences for the mother. The efforts she should make to adjust psychologically to separation from her child necessarily affect her operational availability, her effectiveness and her ability to withstand stress. There are, obviously, exceptional women – adventurers, women in humanitarian roles, and legendary female fighters – whom we admire, but here we are not talking about those exceptional women; we are concerned with those with ordinary abilities in terms of courage, educational abilities and affective capacity.
In 1956, Donald W. Winnicott, an English paediatrician and psychoanalyst, described what he called the “primary maternal preoccupation”, referring to a mother’s ability to adjust to her child’s needs4, and his ideas have not been disputed. This biological and psychological stage involves a necessary deference towards the young child. The mother leaves this stage only gradually, over several months. She lessens her attention imperceptibly as her child grows, in phase with the progress made by the infant.
In contrast, with a woman in an occupation that involves a lot of “operational” activity or that is highly “masculine”, it may be difficult to fully experience that stage. Finding herself torn between her professional duties and this special bond, she may insidiously develop psychological manifestations that prevent her complete involvement in the mission. In addition, instead of reaping the benefits to be gained from early and adequate mothering of her new-born, there is a risk, over the years, of having to deal with her child’s anxiety and behavioural disorders. These too can have a long-term impact in terms of operational availability.
Without necessarily questioning the commitment of mothers – and hence of women in general – in the armed forces, we should also consider, without any preconceptions, the specific features of the relationship between a mother and her young child. By ignoring these “ordinary” psychological aspects, serious problems can emerge, both within soldiers’ families and in carrying out the mission. These points can, of course, always produce controversy and criticism along the lines “What about the father?” and “Is there no need to consider the possible consequences for him and/or his young child of leaving on opexs?”
There are indeed exceptional, but real, situations where the father is effectively the maternal figure for the child. In these situations, his departure can prove just as problematical. There are also situations where the mother, lacking support from her partner, has problems in adequately carrying out her nurturing role for the infant. If the father is absent for reasons connected with his occupation, the rest of the family, or wider social circle, will have to take his place to provide this reassuring support.
Just as we have described the concept of an individual’s “internal basis of security”, we can talk about a family’s “ basis of security”5. This term was described by Professor M. Delage, former head of the psychiatric service at the Sainte-Anne Armed Forces Training Hospital, in Toulon. As a doctor, he was interested in the influence of traumatic events and problems on the family unit as a whole. He explained that there are vulnerability factors and protective factors within all families. Each reacts differently, depending on its beliefs, its history and its abilities to open up and communicate. For him, a family with young children is necessarily inward-looking. Intra-family bonds are inevitably very tight, in view of the mother-child system’s needs for protection. That is a normal development.
A young mother’s departure for an OPEX thus upsets the whole family unit, but the disruption will be borne better if the family has, within itself, a good “basis of security” in terms of psychological resources and abilities to communicate. A family with no external resources to draw on, and which is already, for a variety of reasons, weakened in psychological terms, will have difficulty in handling and reacting to the mother’s absence.
The young mother’s departure (which is currently a frequent situation) therefore raises specific problems that the military organisation, in recruiting women, should not ignore. What measures can then be taken to protect and prepare the recruits, and to support them and avoid them – suddenly or insidiously – finding themselves ill equipped to deal with the situation?
- Mothers’ departure on opexs – How should it be considered?
Without our wishing to act as a substitute for the high command, it is reasonable to call for reflection on some practical issues:
- How large a proportion of recruitment can be accounted for by women?
- How should they be distributed: in which units and for which missions?
- Are there periods in the life of a family that are incompatible with the woman leaving for an opex?
- What social, family and possible psychological support measures should be introduced?
- Should that support take place before, during and/or after the mission?
- What could be the costs of this for the military, looking at those incurred both in an ideal situation, where everything goes well, and one where problems of appropriate adjustment emerge on various time scales?
It should be stated from the outset that the operational potential of mothers in the armed forces do not come within the skill range of psychiatrists. In theory, that is a choice made when they enlist; a choice for which preparation is made with tools and with psychological and social modes of assistance. There are already support measures for the families of soldiers before they leave on opexs. cafs, or “Family Assistance Cells”, in the units or staff headquarters (particularly cabat, the Army Wounded Assistance Cell, and cabmf-air, the Air Force Wounded, Sick and Family Assistance Cell) act as solidarity and information centres before and during the missions. Social assistants are involved in these provisions and can take action at any moment in the event of particular distress in the course of an opex. These general provisions are essential, and it should be ensured that they are appropriate for the very special dangers associated with separation between mothers and their young children. How responsive they are will determine those families’ futures in the event of material or educational problems arising during a mission. Without that social support, a family that is suffering, even if assisted by the unit’s doctor or a psychologist, may feel abandoned, exacerbating the experience of separation.
It is therefore not a question of discrimination between men and women or between childless women and mothers, but of thinking about problems that will not go away. If these matters are not considered, there is a danger that the people who act (unit commanders, unit doctors, social assistants and individual supervisors) could find themselves in an emergency situation that may be serious, and which they have to manage alone and without consultation or planning. Often, the simple fact of looking at a family or social problem, and listening attentively with respect for the members’ privacy, makes it possible to defuse the tensions that are prejudicial to the health of individuals and the mission’s success. Assessments of those situations involving separation should be carried out well beforehand, with no attitude of distrust or discrimination, but in a confidential and respectful atmosphere; that alone will enable the departures to succeed and allow satisfactory accomplishment of the mission.
What is needed is to offer assistance through the allocation of time for an interview with the person concerned, without dramatising the situation or playing down the implications. Just being prepared to consider the specific features of those situations often allows the young mother to withdraw more easily, without feeling guilty or a failure, or – on the contrary – to back up a strong motivation to depart on the mission, while also knowing that she has been listened to.
There are important factors, given below, that a unit commander can assess through an interview.
- Motivation. If, for example, this is solely financial then, for the reasons given above, it will not survive the pressures imposed by the mission: the dangers, stress, fatigue and efforts to adjust to the situation of separation from a young child. Similarly, the desire a mother exhibits to prove her willingness to participate or to display loyalty to the group should be noted by the commanding officers. These mothers, who are young or even very young, want to prove themselves: all the more so because they are women. Some are ready to accept departure just to show how “strong” they are. Criticisms made of them, whether or not overt, strengthen their resolve to show their determination and courage, especially if they have come back from a long period of maternity leave. Sometimes, their departure follows that of their partner, if he is also in the military, and that produces even more disruption to the childcare and to the robustness of family bonds. Those departures involving weak motivation are a source of great family fragility, often leading to a rapid deterioration in suitability during or at the end of the mission (going on sick leave, taking a long period off or asking for discharge, etc.).
- Nature of the wider family and social circle. How available is the father, and what is his position in relation to “maternal” aspects of infant care? Is he used to dealing with the young child? Where do other members of the family live, and how available are they? Is there already a family plan in existence to deal with the young mother’s absence? Does the mother trust these arrangements?
- Families invited to get in touch with the unit’s social department. In the event of inadequacies in the infant’s milieu, the social assistant can also arrange for forms of assistance in advance of the departure. This can reassure the mother and child, as the difficulties will have been identified and allowed for in advance, before any crisis occurs.
- The existence of specific problems: serious illness in the child, existing separation from the father, single-mother situations.
- Post-maternity leave. What happened when this young mother returned to her duties after her pregnancy, and how did she re-adjust to the limitations imposed by her position in the unit, in peacetime conditions with no operational demands? If lasting or repeated problems of withstanding stress and remaining available have already emerged, considerable thought should be given regarding departure for an opex.
- A difficult balancing act
While some military specialities remain barred to women for easily understood physical reasons or the psychological environment, others have become areas where they predominate (60% success rate in the competition for entry to the armed forces medical school). At the same time, the French forces have seen a considerable reduction in their numerical strength, and increasing opexs, with battles becoming increasingly violent, to the point where people have started to talk of “war”. It would have been unthinkable for the health service to have kept its female staff out of armed conflict, or even from the most violent engagements. It had to remain credible, with a genuine future role. Asserting that that hasn’t presented some problems in terms of staff management would be a lie.
While the period of compulsory military service and the nato-Warsaw Pact stand-off made it possible to think of a hospital career, or a future as a unit or hospital doctor just in French or German garrisons, the reality is very different today. Being sent on missions is the rule, and confronting violence and death is unavoidable. No candidate in the entry competition or applying for a position in the health service can ignore it any longer. The women, like the men, have chosen to be professional soldiers, even if it was to bring relief and provide care. The mandatory course to prepare for opexs, with its programme of training in handling arms and shooting, is, furthermore, unambiguous in this field.
Other women make the choice in complete freedom, to serve in combat units, or those providing back-up or support. During the basic training and in the military schools, the end-purpose of professional soldiers is in no way concealed. For some of the women recruits, with fixed-term contracts, going into the armed forces will be an initial experience of work, with no effect on their private lives and family responsibilities. Those who continue with military careers will, like Françoise, Anne and Catherine, have to reconcile family life and motherhood with their occupational lives, while remembering that their choices were deliberate, made in full knowledge of what was involved.
The public-functionary status offers men and women strict equality in terms of pay, for equal responsibilities and equal rights, but it also involves a duty to carry out the same missions in whatever is the individual’s speciality or expertise. It is by demonstrating, through their acts, their availability, their capabilities and their professional effectiveness – and not by invoking some specific status and right to be treated differently – that women soldiers will stand out in a world that is still too ruled by machismo.
On the other side, the military establishment will have to stop referring to the women in its ranks as “exceptions”, who present problems. France’s armed forces, like all other Western armies, are faced with questions of recruitment and ensuring loyalty. They cannot afford to neglect potential female recruits, but must take pragmatic steps that will enable continued existence of the resource.
1 C. Le Page, J. Bensoussan, Les Militaires et leurs familles, SGA/SPAC/PGT, June 2010.
2 L’engagement du service de santé des armées en Afghanistan. Les médecins militaires face à la prise de risque, in Le Quotidien du Médecin, 26 October 2010, pp. 8-9.
3 D.W. Winnicott, quoted in La Mère suffisamment bonne (Paris, PBP, 2006); J. Bowlby, Attachement et perte (3 vol., Paris, puf, 1978); S. Lebovici & S. Stoléru, Le Nourrisson, sa mère et le psychanalyste : les interactions précoces (2003); A. Freud, Normality and Pathology in Childhood (French translation by Dr Daniel Widl…cher, Paris, Gallimard, 1968); M. Klein, La Psychanalyse des enfants (Paris, PUF, 2009).
4 D.W. Winnicot, as quoted in La Mère suffisamment bonne, Paris, PBP, 2006.
5 M. Delage, Répercussions familiales du traumatisme psychique, in Stress et trauma, 1 (4), 2001, pp. 203-211.