Plutôt que de rédiger un énième commentaire enthousiaste, et nécessairement obséquieux, il m’est apparu plus intéressant de faire partager ce court essai à plusieurs proches, gravitant tous assez loin du paysage institutionnel. Car c’est probablement d’abord à cette nation assez indifférente à la chose militaire que le général Bentégeat adresse son message ; message en forme d’inventaire dans lequel ressortent à chaque page sa profonde affection pour ses compagnons d’armes d’hier ou d’aujourd’hui, mais également toute la force de ses convictions sur « le beau métier de soldat ».
Tous les commentaires, quels que soient les horizons qui s’expriment, traduisent à peu près les mêmes tendances. Derrière un décor suranné et un brin poussiéreux, qui marque à l’évidence la fin d’une certaine époque, et après un étonnement légitime face à la désuétude apparente de certains sujets peu vendeurs, on sent, disent la plupart des lecteurs, frémir des choses authentiques et éternelles : celles du monde immuable de l’action armée dont la forme importe moins que le fond ; celle de la fraternité d’arme dont les fondements restent le goût de l’action et celui du bien commun.
Beaucoup ont entamé chaque chapitre avec une pointe d’inquiétude, craignant de ne pas être à la hauteur pour entrer dans l’intimité de la chose militaire. Tous en ressortent séduits par un discours juste et équilibré, inspiré par une vie intense au service d’une cause qui la dépasse. Point de nostalgie ni de coup de gueule facile. Point de cliché pour soulager l’ego du soldat. Au fil du texte, et par-delà les formules, apparaît un bon sens réconfortant dans lequel le lecteur non averti trouvera une étonnante proximité, une expérience à partager et des valeurs communes. Seul bémol remontant de ces quelques commentaires exotiques, un certain essoufflement sur la fin, lorsque le « ressenti » distillé au fil des chapitres finit par donner au raisonnement un goût de bons sentiments. Mais n’est-ce pas seulement la preuve que le message diffusé atteint rapidement sa cible ?
En somme, à travers la finesse d’un style simple et droit, et d’une pédagogie de la redondance, le général a à l’évidence gagné son pari : faire de chaque lecteur un complice inspiré d’une noble cause et un disciple potentiel à même de diffuser une certaine idée de la France en armes.
Dès lors, que pourrait rajouter le militaire que je suis au large plébiscite d’un public profane ? Au-delà de la riche collection de citations et de références que nous avons tous croisée un jour ou l’autre, et que le texte organise de manière aussi rigoureuse que poétique, je garderais tout simplement de cette lecture le souvenir d’une intense émotion. C’est un peu court, penserez-vous, mais, après tout, n’est-ce pas fondamentalement le projet de l’auteur ?
En faisant de la « passion » le titre de son ouvrage et de l’« amour » le fil rouge de son raisonnement, le général Bentégeat nous dévoile à la fois le secret qui a marqué son engagement personnel et le cap qu’il nous invite à garder pour laisser au soldat tout son rôle dans la cité de demain.