« La civilisation se demande si la justice est tellement arriérée qu’elle se trouve complètement impuissante devant des crimes d’une telle ampleur et commis par des criminels d’une telle envergure. La question n’est pas de savoir comment rendre la guerre impossible, mais comment une procédure, fondée sur le droit des gens, pèsera dans la balance pour préserver désormais la paix et pour permettre aux hommes et aux femmes de bonne volonté de vivre libres et sous la protection de la loi. »
Robert Jackson, procureur général des États-Unis
au procès de Nuremberg
Pour témoigner de la place et du rôle du conseiller juridique en opération (Legal Advisor, « legad »), il convient de surmonter deux pensées qui inciteraient plutôt à y renoncer. D’abord, la conviction que le témoignage ne supporte pas plus l’analyse que le papillon le filet. Ensuite, le souvenir de ce qu’Hermann Hesse écrit dans le Jeu de perles de verre à propos des « articles de variétés », aimables bavardages, causeries diverses meublant la presse et flattant des « lecteurs en mal de culture ». Ainsi, un témoignage à travers les lunettes du legad s’écrit non tant pour plaire que pour éclairer, débattre, parfois agacer, convaincre enfin ceux qui voient d’un œil dubitatif cet « empêcheur de bombarder en rond », sobriquet dont j’eus l’honneur d’être affublée et que j’eus la responsabilité de défendre lors de ma première mission en tant que conseiller juridique de l’armée de l’air déployé sur le théâtre d’opérations afghan.
Le phénomène de judiciarisation croissante du « théâtre d’opérations » se manifeste de prime abord par la présence d’un conseiller juridique de terrain rendue obligatoire pour valider les règles d’opérations militaires1. Il se caractérise également par la coexistence d’une multiplicité de règles très précises aux côtés des grands principes du droit international humanitaire, par la doctrine et l’élaboration de manuels de droit opérationnel, ou encore par le rôle d’influence croissant de la jurisprudence des tribunaux pénaux internationaux.
Si le rôle préventif et didactique du legad apparaît nécessaire à l’encadrement de l’usage de la force, il permet également d’appréhender de manière pragmatique le phénomène de judiciarisation des conflits dont la nature évolutive situe de plus en plus l’action militaire au cœur des populations civiles. La relation du legad, « conseiller » au service du commandement, à son chef met ainsi en évidence les contraintes propres à l’influence prégnante de la règle de droit sur l’action militaire.
- Un « objecteur de conscience » ?
D’Aristote à Pascal, en passant par saint Augustin et Kant, et jusqu’à Michel Foucault pour ne citer que ces derniers, les rapports entre le recours à la force et le droit ont été étudiés par de nombreux philosophes. Mais ce sont surtout les internationalistes qui se sont interrogés sur les rapports entre le droit et la force, de Grotius, dans son célèbre « jure belli ac pacis », à R.-J. Dupuy pour qui la paix par le droit reste un mythe. C’est en ayant à l’esprit un tel héritage philosophique et historique, qui souligne le rapport indissociable entre le droit et l’usage de la force, que le legad évolue au gré de ses missions, adaptant ses conseils à un contexte politico-militaire sans cesse renouvelé.
Aussi, afin de mieux appréhender la fonction du conseiller juridique dans le contexte particulier des opérations extérieures2, cet article se propose d’être une réflexion sur le poste du legad « air » dans l’opération militaire interalliée menée en Afghanistan et pour laquelle je fus déployée au mois de décembre 2007 auprès du Senior National Representative de l’armée de l’air (fr snr acc) posté à Kaboul, par la suite transféré auprès du Combined Air Operation Center (caoc) au Moyen-Orient.
Qualifié d’« objecteur de conscience » parce qu’il n’hésite pas s’il le faut à opposer une opinion juridiquement fondée aux velléités de destruction d’objectifs militaires, le legad opère en amont de l’opération aérienne dans un cadre préventif et didactique. Lorsqu’il intervient en aval de la mission, il semble exercer un rôle plus critique et prospectif.
- Un rôle didactique et préventif en amont de la mission
En premier lieu, dans le contexte particulier des opérations extérieures, il appartient au legad de faire la lumière sur ce qui peut a priori paraître comme un enchevêtrement juridique complexe fait de directives militaires, de lois nationales et de traités internationaux. Un conseil juridique avisé ne se limite donc pas au seul droit des conflits armés mais s’exerce dans le cadre du mandat accordé à la force déployée (onu, otan pour la fias), des éventuels accords intergouvernementaux en vigueur, notamment ceux relatifs au statut des forces (sofa3). Il intègre également la totalité du droit positif français si le problème juridique soulevé respecte les procédures et les règles nationales. Enfin, aux règles d’exercice de la légitime défense et aux dispositions nationales applicables en matière de détention s’ajoutent notamment des questions spécifiques relatives au soutien des forces par la nation hôte (litiges contractuels, précontentieux et règlement des dommages).
Déployé sur le théâtre d’opérations afghan après avoir effectué une solide formation juridique4, le jeune legad « air » doit dès son arrivée s’approprier l’ensemble de ce corpus juridique particulièrement dense et complexe. Son manque d’expérience pratique ajouté à son jeune âge ne doit pas a priori constituer un obstacle à l’accomplissement de sa mission. Toutefois, force est de constater qu’il doit se « nourrir » de l’expérience des « opérationnels » afin de nuancer ses propos. Le danger du juriste « expert » dans son domaine mais se complaisant dans un langage hermétique aux non-initiés doit à tout prix être évité. Une parfaite connaissance juridique théorique ne suffit pas. L’assimilation des termes aéronautiques techniques et la compréhension des difficultés des missions aériennes sont en effet un gage de sa crédibilité.
De manière plus spécifique, le legad placé sous l’autorité de l’armée de l’air déployée dans le cadre de l’isaf, a pour tâche principale de réaliser un exposé des règles d’engagement (roe) de l’opération Pamir/Serpentair au profit des équipages de chasse et de transport, mais aussi des officiers de liaison et des Joint Tactical Air Control (jtac) français insérés au sein de la coalition. Véritable « temps fort », l’expérience du « briefing roe » au moment clé des relèves des équipages est l’occasion de s’assurer de la correcte assimilation des règles d’engagement et des éventuels « caveat »5 de la coalition. Le droit de la conduite des opérations se fondant sur les principes de discrimination dans les objectifs militaires et de proportionnalité dans les moyens utilisés, le rôle didactique et préventif du legad au côté du snr acc s’inscrit ainsi pleinement dans le cadre du contrôle national des frappes. Son manque d’expérience « opérationnelle » est compensé par l’autorité légitime du snr acc qui participe au « briefing roe » et se fait le relais des questions des équipages.
Constitué de nombreux cas pratiques agrémentés de films des précédents tirs effectués, de cartes mais aussi de retranscriptions des dialogues jtac-pilote, le briefing du legad est fortement imprégné de la culture aéronautique, mélange subtil d’informations et de « retour d’expérience » (retex). Loin d’être un inventaire à la Prévert, il permet d’aborder une sélection de scénarios pouvant prêter à caution (par exemple, le bombardement d’un objectif militaire constitué d’un groupe d’insurgés réfugié dans un édifice religieux ou situé aux frontières de l’Afghanistan) et d’apporter ainsi la sérénité nécessaire aux équipages avant leurs vols. Cette démarche active de clarification et de diffusion de la règle de droit à l’ensemble du personnel directement impliqué dans la délivrance d’armement est particulièrement appréciée. Elle permet par ailleurs d’optimiser l’emploi de la force lors des étapes de planification quotidienne des missions.
- Un rôle critique et prospectif en aval de la mission
Assurant un rôle préventif et didactique en amont de la mission aérienne, le legad « air » exerce également un contrôle de « conformité juridique » essentiel dans les phases de conduite des opérations. Sa position géographique dans l’enceinte du centre de conduite des opérations aériennes (caoc) lui donne par ailleurs l’occasion d’apprendre beaucoup des méthodes de travail de ses collègues juristes américains et britanniques plus directement impliqués et engagés dans le processus décisionnel. En règle générale, ces Judge Advocate General (jag)6 sont exclusivement des officiers supérieurs (au minimum lieutenant-colonel) par opposition aux legad « air » français (lieutenant ou jeune capitaine). Leur rôle dans la conduite des opérations est aussi nettement plus responsabilisant. Parfaitement intégrés au fonctionnement du caoc, ils travaillent en continu au rythme des « trois fois huit heures ». L’implantation de leur siège, stratégiquement situé aux côtés de ceux de l’Afghanistan Duty Officer et du Chief of Combat Operation, révèle l’importance donnée à leur avis en ce qui concerne la légalité d’une frappe, en particulier lorsque celle-ci est susceptible de mettre la vie des populations civiles en danger. La difficulté de la tâche du legad « air » est alors de délivrer un avis suffisamment précis en un délai particulièrement limité.
Une parfaite connaissance des textes juridiques de référence, mais également la prise en compte des informations des spécialistes du renseignement qui établissent un « schéma de vie quotidien »7 autour de la cible potentielle permettent au jag de se forger une opinion. Désormais, dans la conduite des guerres contre-insurrectionnelles, il s’agit principalement de repérer, d’identifier, puis de « prendre sur le fait » des individus ou des petits groupes d’individus reconnus comme étant les insurgents recherchés. Le conseil juridique prodigué en amont, lors des phases de planification, doit ainsi constamment être révisé à la lumière des nouvelles informations de renseignement et des images en temps réel provenant du drone survolant le théâtre d’opérations.
Le legad intervient ainsi de plus en plus fréquemment à la frontière du droit et de l’opérationnel. Situé à des milliers de kilomètres du champ de bataille, il est cependant capable de donner un avis juridique avisé en temps réel. Il assure donc à juste titre le rôle complexe et singulier d’« objecteur de conscience », où tout l’enjeu consiste à ne pas laisser les considérations opérationnelles l’emporter systématiquement sur le droit.
D’« objecteur de conscience », le legad se fait également « conseiller » à la disposition du commandement conscient des limites de l’intégration de règles de droit souvent complexes et de la nécessité d’adapter le conseil juridique aux enjeux de demain.
- Un « conseiller » juridique au service du commandement
Si le droit encadre le recours à la force, il peut néanmoins être perçu comme une contrainte supplémentaire à l’action militaire. Le legad est ainsi un « conseiller » avisé du fait juridique à la disposition du commandement. Il convient dès lors de s’intéresser à la nature des relations qui l’unit à celui-ci. Quelles sont les limites propres au conseil juridique ? De quelle latitude dispose le legad dans son rôle de conseil ? Ce dernier exerce-t-il une influence préjudiciable à l’efficacité du processus décisionnel ? Quelles conséquences en cas de prise de décision contraire aux conseils prodigués ? À qui rend-il des comptes ?
Autant de questions appelant des réponses claires et précises, mais dont la spontanéité révèle parfois l’existence de « zones d’ombre » (grey area), expression consacrée par l’ensemble de la communauté des legad et qui illustre la complexité croissante du paysage juridique des opérations extérieures.
- Le legad conseille, le chef décide
En pratique, donner un conseil éclairé et indépendant implique une liberté de parole totale du legad vis-à-vis de son chef. Mais cette liberté de ton ne doit pas pour autant dépasser la sphère du conseil au commandement. En d’autres termes, l’opinion du legad, en particulier lorsqu’elle contredit celle de son chef, ne doit pas être exportée sans l’accord de celui-ci, conformément au principe de subordination hiérarchique qui unit ces deux personnes. En l’espèce, la directive ema/daj du 8 février 2006 prévoit que pour l’ensemble de ses attributions, « le conseiller juridique est exclusivement subordonné à l’autorité militaire auprès de laquelle il est placé pour emploi, et agit en conséquence dans le cadre des directives de cette autorité ».
Le choix qui a été retenu par les Français est celui d’une chaîne hiérarchique unique, à l’opposé de la très grande majorité des pays membres de l’Alliance, qui a opté pour le maintien d’une double chaîne juridique et opérationnelle. Le corps des jag américains ou des avocats militaires des forces armées britanniques et canadiennes est en effet l’illustration parfaite de la séparation stricte entre le « juridique » et l’« opérationnel » censée offrir plus de garanties d’indépendance à la chaîne juridique. Quant au legad français, comme tout autre conseiller auprès de l’état-major du théâtre d’opération, il est soumis au principe d’obéissance hiérarchique qui n’interdit cependant pas une saisine extérieure, qu’elle soit légale ou volontaire.
Le legad déployé en opération extérieure n’ayant pas, contrairement à ses collègues anglo-saxons, l’opportunité de travailler en équipe, peut en effet éprouver le besoin de confronter son argumentation. Afin de pallier ce problème d’« isolement », les autres experts juridiques du ministère de la Défense (daj, ema/Jurmil, cdaoa/bureau des affaires juridiques) apparaissent comme les maillons essentiels de la chaîne fonctionnelle. Si le conseiller juridique n’est pas saisi par son commandement, il doit alors pouvoir adopter un rôle proactif, ses chefs ne maîtrisant pas a priori l’ensemble des implications juridiques de leur décision8. Afin de contrebalancer les critiques d’un droit paralysant l’action militaire par crainte de voir trop souvent la responsabilité pénale engagée, il est donc dans l’intérêt du chef d’associer son conseiller juridique tout au long du processus décisionnel.
« My job is to give the commanders options. » Cette déclaration du colonel Bill Coranza, chef jag au caoc en charge de la conduite des opérations aériennes d’Irak et d’Afghanistan, est révélatrice de la juste position du conseiller juridique au service du commandement : il doit éclairer la décision du chef et non pas la valider. Les réactions ne se font toutefois pas attendre pour ceux opérant au caoc : « Certains officiers de l’armée de terre américaine se plaignent cependant que l’armée de l’air est trop prudente et que les mesures qui consistent à épargner les vies des populations civiles peuvent accroître la mise en danger des troupes américaines. » Le caoc est « une bureaucratie qui cherche avant tout à se protéger », dit un général de l’armée de terre « qui vise à s’assurer que l’armée de l’air ne laisse nulle part son empreinte » 9.
Chez nos alliés, la frustration des soldats déployés en première ligne existe bien. Néanmoins, le rôle de conseil du legad doit se limiter à proposer des solutions au commandement qui seul est en mesure de prendre la décision finale. Ainsi, les « guerres parmi les populations », selon l’expression préférée à celle de « guerres asymétriques » par son auteur, sir general Rupert Smith10, invitent à repenser non tant les objectifs militaires que l’ensemble des moyens employés pour optimiser l’usage de la force tout en minimisant les dommages collatéraux.
- L’expérience d’aujourd’hui, les défis de demain
Pour finir, un dernier mot de réflexion sur l’expérience du legad « air » dans les opérations actuellement menées en Afghanistan, où la stratégie militaire de contre-insurrection consiste, selon le slogan militaire largement médiatisé, à « gagner les cœurs et les esprits »11. Répondant d’une part aux exigences d’« humanité », le droit se fait l’allié des évolutions technologiques et des procédures de targeting (« ciblage ») visant à minimiser les dommages collatéraux. Mais l’introduction de nouvelles technologies, en particulier l’usage intensif des drones, soulève aujourd’hui de nouvelles questions sur le rôle du legad au sein d’une armée de l’air en mutation.
Les guerres et les catastrophes humanitaires s’achèvent le plus souvent par une « victoire du droit » pouvant aller de la création de tribunaux pénaux internationaux ad hoc à l’adoption de nouveaux textes censés être plus protecteurs. Cela signifie-t-il que le droit, et par extrapolation les « conseils » du legad, ont constamment une guerre de retard ? Selon Françoise Bouchet-Saulnier, le « droit de la guerre rebaptisé droit humanitaire n’est pas un droit idéal »12. Ni pacifiste ni angélique, il est en effet le produit des siècles de réflexion sur les méthodes de guerre. Or aujourd’hui, la nature même des « guerres parmi les populations » place la question des dommages collatéraux au cœur du débat juridique et très souvent le thème des reportages télévisés consacrés aux conflits d’Irak et d’Afghanistan13. C’est dans ce contexte de guerre subversive à la recherche des insurgés ou going hunting (« partir à la chasse ») que les techniques de targeting ont beaucoup évolué, faisant la part belle aux drones armés de type Predators.
Les récentes contributions technologiques à la conduite des opérations ont apporté plus de précision et de flexibilité dans les différentes phases de la mission aérienne. Elles posent ainsi avec pertinence la question des adaptations nécessaires du conseil juridique aux défis de demain.
L’observation des changements opérés au sein de l’armée de l’air américaine permet d’en appréhender les enjeux. C’est ainsi qu’à la demande expresse du Pentagone, le nombre de Predators utilisés en Irak et en Afghanistan n’aurait cessé d’augmenter depuis le début des hostilités, posant la question légitime de la place dévolue aux pilotes de drones dans la nouvelle armée de l’air. En 2007, au sein de l’armée de l’air américaine, la demande de formation de ces spécialistes était en effet si importante qu’une nouvelle génération de pilotes (par opposition à la celle issue de la très prestigieuse caste des pilotes de chasse) a ainsi vu le jour. Désormais, il n’est plus nécessaire d’avancer une expérience solide de pilotage pour effectuer la formation et devenir pilote de drone de l’us Air Force. Ce simple constat, qui laisse pressentir un profond bouleversement culturel touchant à l’identité de l’armée de l’air américaine, pose toutefois avec acuité la question du positionnement physique du legad « air » de demain.
Si aujourd’hui le pilote est seul dans son cockpit au moment de prendre la décision de tirer, en sera-t-il toujours ainsi pour cette nouvelle génération d’officiers capables de piloter simultanément et à des milliers de kilomètres du conflit jusqu’à quatre Predators ? À son tour délocalisé et privé du contact direct avec le terrain, pourquoi le pilote de drone se priverait-il de la présence d’un conseiller juridique, ultime rempart au dévoiement toujours possible de l’arme aérienne ? Ne faudra-t-il pas accentuer la formation de ces personnels en droit opérationnel ? L’originalité et la force du droit humanitaire, ultime référence dans les situations de crise et de conflit qui permette d’assurer la survie des individus contre la violence des sociétés, ne résident-elles pas dans le fait que« ce droit n’appartient ni aux juristes, ni aux spécialistes, mais doit être connu et défendu par le plus grand nombre »14 ?
Manifestation « physique » de la judiciarisation du champ de bataille, la place du legad auprès du commandement semble désormais bien ancrée dans les mentalités de la communauté militaire soucieuse de respecter le cadre légal. Situé de plus en plus au « cœur de l’opérationnel » et contraint d’adapter ses conseils aux nouveaux enjeux, celui-ci trouve ainsi dans les enseignements de Machiavel au prince une source d’inspiration d’une saisissante modernité : « Vous devez donc savoir qu’il y a deux manières de combattre : l’une avec les lois, l’autre avec la force ; la première est propre à l’homme, la seconde à la bête ; mais comme la première très souvent, ne suffit pas, il convient de recourir à la seconde. [...] Ce qui ne veut pas dire autre chose – d’avoir un précepteur une demi-bête et un demi-homme sinon qu’il faut qu’un prince sache user de l’une et de l’autre nature : et l’une sans l’autre n’est pas durable. »
1 Directive ema/daj du 8 février 2006.
2 Le conseil juridique peut être d’une grande variété selon le mandat, la nature des opérations extérieures et les missions qui lui sont confiées. En ce qui me concerne, j’ai été marquée par deux expériences très différentes : une première de coloration plus « air », au niveau tactique, en tant que legad des opérations aériennes pour Serpentair et Pamir en Afghanistan ; une seconde de profil plus « terre », au niveau opératif otanien, en exerçant de 2008-2009 au Legal Office du jfc Naples en tant que legad Balkans où j’étais chargée, entre autres, des questions juridiques relatives à la gestion post conflit au Kosovo.
3 Le Status of Forces Agreement (sofa) pose le cadre juridique applicable aux éléments déployés sur le théâtre d’opérations (dispositions fiscales et douanières, statut du personnel…). Cf. l’article de Monique Liebert-Champagne dans ce même numéro.
4 Sur la base du volontariat, les commissaires ayant un parcours universitaire de profil juridique participent à une spécialisation en droit des conflits armés qui regroupe un certain nombre de stages effectués majoritairement dans un cadre international (École de l’otan, Institut international de San Remo, Stage daj obligatoire, participation à des exercices nationaux de type Serpentex ou Airex ou interalliés en amont du premier déploiement en Afghanistan).
5 Contraintes juridiques nationales établies par les États concernant l’emploi de la force. Les caveat nationaux sont le plus souvent l’expression de la souveraineté politique d’un État membre de la coalition.
6 À la différence de la France, les conseillers juridiques américains et britanniques sont tous des avocats militaires.
7 Traduction littérale de l’expression « Pattern of life », très usitée.
8 Martin de Crédat, « Le droit et les opérations extérieures », Objectif doctrine, novembre 2000, p. 4.
9 Anna Mulrine, « Lawyers Review Airstrike Plans », Lawyers Review Airstrike Plans, 29 mai 2008.
10 « Guerres parmi les populations » traduction littérale de Wars amongst the People. Rupert Smith, The Utility of Force, « The art of war in the modern world », Penguin Books, 2006. Sir Rupert Smith est général de l’armée de terre britannique, ancien dsaceur ayant quitté le service actif en 2002.
11 Traduction littérale de l’expression « Win hearts and minds of the people » définie dans General David Petraeus, Lt general James F. Amos, Lt colonel A.Nagle, us Army/Marine Counterinsurgency Field Manual, 2006.
12 Françoise Bouchet-Saulnier, Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Paris, La Découverte, 2006.
13 De nombreux colloques et tables rondes sur le droit des conflits armés, dont ceux ayant lieu à l’Institut international humanitaire de San Remo, utilisaient depuis plusieurs années une vidéo datant de 2007 intitulée sur Internet « collateral murder ». Plus que les images, les commentaires des pilotes de l’hélicoptère ont profondément choqué l’opinion publique. Josh Stieber, aujourd’hui vétéran de la même compagnie responsable de la mort de onze civils et de deux blessés irakiens, a été récemment interviewé sur les plateaux de nombreuses chaînes télévisées pour donner son « point de vue ». Il a aujourd’hui quitté les rangs et milite pour la paix.
14 Françoise Bouchet-Saulnier, op. cit.