N°15 | La judiciarisation des conflits

Préface de Jean-Pierre Rioux
Dien Bien Phu vu d’en face. Paroles de Bô dôi
Préface de Jean-Pierre Rioux, Dien Bien Phu vu d’en face. Paroles de Bô dôi, Nouveau Monde éditions

Ouvrage aussi passionnant que poignant !

La bataille de Dien Bien Phu, au printemps 1954, a laissé dans l’imaginaire collectif français une blessure très particulière. Or cette défaite demeure un grand fait d’armes, peut-être celui de la dernière grande bataille des temps modernes. La victoire vietminh est due autant au courage de ses hommes, à leur abnégation qu’à leur capacité à surprendre le commandement français par le recours à des armes inattendues dans ce lieu. Cette méconnaissance française est responsable de la défaite. Le comportement admirable des combattants français et de l’Union française n’a pu compenser l’erreur stratégique.

J’ai eu personnellement l’occasion, en décembre 1975, de rencontrer le professeur Ton That Tung, médecin chef du général Giap, qui m’a alors raconté l’histoire de Dien Bien Phu vue du côté vietminh. Il m’a dit son admiration pour l’armée française et l’énergie de sa défense. Il attribuait la victoire à l’usage de canons de 105, toujours camouflés, tractés dans la jungle par des centaines de soldats, des canons peu nombreux qui ne tiraient que lorsqu’un objectif avait été repéré à l’occasion des fausses attaques. Leur invisibilité, leur changement incessant de place donnaient l’illusion d’une force de frappe inquiétante. Le suicide du colonel Pirofr témoigne de la découverte trop tardive par le commandement français de l’inéluctable enfermement qui allait conduire à la chute du camp retranché.

Cet ouvrage se lit avec angoisse, car on mesure d’emblée que le piège va se refermer sur une armée française trop sûre d’elle. Pourtant, si le vietminh avait lancé son attaque initiale, rapide, comme prévu, il aurait perdu. C’est le génie militaire du général Giap d’avoir choisi l’attaque et la prise progressive de chacun des pitons défensifs plutôt que l’attaque frontale.

Les témoignages d’anciens combattants, modestes ou détenant de hautes responsabilités, contenus dans cet ouvrage sont d’une richesse extrême. Ce livre devrait être lu par tous les militaires, comme dernier témoignage de ce que fut un combat où l’honneur avait encore sa place de part et d’autre. La tragédie de la longue marche des prisonniers et, la mort en captivité de beaucoup d’entre eux n’ont pas fait disparaître le souvenir de quelques gestes chevaleresques des deux côtés.


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