N°50 | Entre virtuel et réel

Antoine Bourguilleau

Modéliser le réel. la naissance d’un jeu de guerre

En 2024, tandis que d’autres se réjouiront de la tenue des Jeux olympiques de Paris, nous serons quelques-uns à fêter le bicentenaire de la présentation du premier kriegsspiel à l’état-major de l’armée prussienne. C’est en effet en 1824 que le lieutenant Reisswitz y expose un jeu simulant des opérations militaires, sur une carte, avec des pions figurant des troupes dont la taille correspond à l’emprise de celles-ci sur le terrain1 et qui sont déplacés à l’aide d’une réglette, où les combats sont gérés par des dés et le brouillard de la guerre est matérialisé par un paravent qui sépare la table en deux. Peu enthousiaste, le général von Müffling, chef d’état-major des armées, se désintéresse ostensiblement de l’exercice avant de se laisser peu à peu gagner par l’enthousiasme des participants et de s’exclamer : « Mais ce n’est pas un jeu ordinaire, c’est un entraînement à la guerre ! Je dois le recommander chaudement au reste de l’armée2 ! » Le kriegsspiel est alors intégré à la formation des officiers de l’armée prussienne.

Quelques décennies plus tard, certains commentateurs attribuent notamment à la pratique du kriegsspiel, que l’on n’appelle pas encore wargame, les éclatantes victoires prussiennes de 1864, 1866 et 1870-1871. De nombreuses académies militaires s’emparent de l’outil et certaines, comme le Naval War College états-unien, vont l’utiliser sans discontinuer jusqu’à ce jour. En France, si les jeux de guerre ont été parfois employés à divers échelons de l’institution militaire, ils n’ont jamais réellement connu un usage aussi systématique. Mais les choses pourraient bien changer sous l’impulsion d’acteurs convaincus de la pertinence de l’outil. En 2021, l’École de guerre-terre m’a ainsi donné la chance de créer et de développer avec plusieurs officiers les règles de Duel tactique, un wargame à destination des stagiaires de cette école, ainsi qu’un autre jeu de simulation de crise sur le territoire national baptisé Cymopolée3.

  • Qu’est-ce qu’un wargame ?

Selon la définition donnée par Francis McHugh en 1966, un wargame est « une simulation d’aspects choisis d’une situation de conflit, qui s’appuie sur un jeu de règles prédéfinies, de données et de procédures » afin d’offrir des expériences de prise de décision et des informations utilisables dans le monde réel4. Il peut prendre des formes très variées, manuelle (avec des pions, sur une carte), informatisée ou hybride, et ne doit pas être confondu avec des simulateurs. On ne doit pas non plus l’assimiler à des exercices historiques de terrain (eht) et pas davantage aux séances dites de wargaming, au cours desquelles les officiers testent la confrontation de modes d’action ami/ennemi à l’issue des exercices de conception de manœuvre. Cette dénomination pose d’ailleurs problème, car elle laisse à penser que l’on utilise de manière systématique le wargame au sein de l’armée de terre française. Il n’y a pourtant pas de jeu ici, mais un simple tableau à double entrée, dont est absente celle qui est pourtant constitutive de la guerre : la friction chère à Clausewitz5. Il faudrait sans doute lui préférer un terme plus générique et moins source de confusion, comme « confrontation ma/me », déjà en usage, que de véritables sessions de wargames pourraient compléter afin de nourrir la réflexion6.

  • Le wargame à l’École de guerre-terre

Mes premiers contacts avec l’École de guerre-terre datent d’octobre 2020, lorsqu’un officier stagiaire me propose d’animer une session de wargame pour son groupe de travail. Nous optons pour des jeux simples, avec quatre scénarios consacrés à la campagne de France de 1940. Informé de la tenue de ces exercices, l’encadrement de l’école vient y participer, notamment le chef du bureau de l’enseignement, qui cherche une méthode pédagogique innovante pour compléter le module de tactique générale7. Des discussions s’engagent alors sur la possibilité d’utiliser le jeu de guerre comme outil de formation des stagiaires au cours du premier semestre de scolarité. Rapidement un projet se dessine. Le directeur de l’école nous laisse carte blanche pour l’élaborer tandis que le gros de la promotion participe à l’exercice Warfighter ; l’ultime épreuve sera le test effectué par ces derniers. Nous envisageons un temps d’utiliser des jeux présents dans le commerce, mais pour plusieurs raisons nous abandonnons cette piste et optons pour la création d’un jeu en interne. Nous arrivons assez rapidement à plusieurs conclusions :

— la plupart des officiers stagiaires ont des connaissances parcellaires de ce qu’est un wargame ; certains s’adonnent à des jeux « grand public » (Memoir 44 est l’un des plus cités), mais l’écrasante majorité n’en a aucune pratique ;

— le jeu doit être relativement simple, car une partie doit arriver à son terme en une session de quatre heures maximum, avec au moins quarante-cinq minutes de retour sur expérience et de discussions tactiques ;

— plusieurs sessions de wargame étant prévues, elles doivent s’appuyer sur des règles communes, avec l’introduction successive de nouveaux éléments (alat, génie…) afin que les stagiaires maîtrisent de mieux en mieux l’outil sans avoir à apprendre à chaque fois une nouvelle règle ;

— le jeu doit pouvoir être rapidement mis en place, de nouveaux scénarios et d’éventuels amendements à la règle pouvoir être appliqués dans l’instant ;

— les joueurs ne doivent pas être entravés par le système, ils doivent dérouler leur plan et ne pas « jouer la règle » afin que le choc des volontés ne se transforme pas en querelle de juristes ;

— on représentera des manœuvres à l’échelle de la brigade ou de la division et l’unité de base du jeu sera le groupement tactique interarmes (gtia).

  • Jeu manuel contre simulation informatique

Il apparaît alors que le meilleur format est celui d’un jeu « manuel », sur un plateau découpé en cases hexagonales, avec des pions en carton/bois. Un format numérique, certes très séduisant, n’offre que peu d’intérêt pour ce que nous voulons faire : il est long à développer, coûteux, compliqué à modifier et, surtout, son système de résolution est caché, or nous souhaitons que les joueurs aient un accès direct au résultat des combats en additionnant et en retranchant des facteurs au jet d’un dé, ce qui permettra à tous de comprendre pourquoi une action a réussi ou a échoué. Enfin, un jeu manuel ne tombe pas en panne, ne nécessite pas de mise à jour et peut être utilisé partout.

Cet aspect est parfois difficile à faire comprendre : nombreux sont ceux qui considèrent les jeux manuels comme une version bas de gamme d’un jeu sur informatique où comme une simple ébauche. Combien de fois avons-nous entendu « vous pourriez l’informatiser » voire « vous devriez l’informatiser » ! Ces remarques sont le reflet d’un lieu commun : l’informatique et le numérique, c’est moderne et sérieux ; le reste est une solution au rabais. C’est à mon sens une grave erreur, symptomatique d’une foi excessive en la technologie et qui oublie qu’au bout du compte, que l’on manie une fronde, une arquebuse ou un lance-missile, ce qui fait la différence, c’est toujours la décision de l’utilisateur d’actionner son arme, fondée sur son appréciation de la situation. Dans une période où chacun constate la de plus en plus grande dépendance aux écrans, et pas uniquement des enfants, il nous semble plus que pertinent d’en revenir à un objet concret avec sa boîte, ses pions, sa carte, ses règles du jeu et ses marqueurs.

La rusticité n’a par ailleurs rien de déshonorant ni de moins performant, et le jeu manuel offre une plasticité qu’aucun jeu informatique ne permet : qu’un modificateur soit considéré comme trop fort ou trop faible, il suffit de déclarer qu’il est changé ou même ôté et le jeu continue. Cela est beaucoup plus ardu sur un logiciel. Surtout, ces remarques sont le reflet d’une méconnaissance des implications de la modélisation. Comme l’a fort justement dit le mathématicien George E. P. Box, « tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles »8. Notre modélisation de la guerre est donc fausse, artificielle par essence ; son informatisation aurait pour effet de faire disparaître sous un vernis technologique toutes ses approximations en donnant aux utilisateurs une fausse impression de « réalisme », quand nous souhaitons précisément que ces approximations soient visibles et critiquables.

  • Le stigmate du jeu et du dé

Mais ces remarques sont également le reflet du stigmate du jeu. Celui-ci est perçu comme quelque chose de peu sérieux, un délassement. Le dé est associé aux jeux de hasard, comme le Jeu de l’oie9 ; il semble que rien de bon ne puisse sortir de ces polyèdres qui roulent – et parfois tombent de la table. Pourtant, la théorie des jeux est utilisée dans de très nombreux domaines, à commencer par la biologie, afin de mieux comprendre les mécaniques d’évolution ; elle est d’ailleurs à l’origine des doctrines de dissuasion nucléaire et elle nous offre, dans le cas qui nous intéresse, un outil plastique et efficace pour simuler de manière simple la « friction »10. Que l’on songe à la quantité de règles et de modificateurs qu’il faudrait prendre en compte si l’on n’utilisait pas les dés pour apporter un peu de randomisation au résultat des combats11. Le dé offre un moyen à la fois simple et rapide de représenter – et non de simuler – une quantité infinie de cas imbriqués : un moral défaillant, une unité galvanisée, une erreur de commandement, un manque de munitions, une manœuvre audacieuse, un mauvais déploiement ou d’autres choses encore, ce qui ne compte guère quand ce qui nous intéresse ici est l’effet général ainsi que les réactions et les adaptations qu’elles doivent engendrer chez celui que le jeu a placé en situation de commandement. Pour l’officier à qui revient cette charge, il importe moins de comprendre finement les raisons d’un échec que d’en tenir compte et de décider s’il convient ou non de s’y adapter et comment.

Avons-nous pu pour autant nous débarrasser du stigmate du dé ? Pas réellement. Voilà pourquoi nous avons défini dans la règle celui-ci comme un « générateur de cas non conformes ». Au-delà de la plaisanterie, cette expression a le mérite de définir exactement à quoi il sert12.

  • Il faut commencer quelque part

Comment créer un jeu ? En partant de quelque part. Nous avons donc utilisé la carte hexagonée d’un jeu du commerce (Platoon Commander: India-Pakistan 1965 de tnb) et des règles inspirées de règles existantes (The Portable Wargame de Bob Cordery, wd). Les unités ont des pas de pertes représentant leurs capacités d’encaissement, des potentiels de mouvements et des caractéristiques propres à leur arme (infanterie mécanisée, blindés, artillerie…).

Des parties sont organisées deux fois par semaine. Après chacune d’elles, un retour sur expérience permet de déterminer ce qui peut être amélioré ou ignoré. Très rapidement naît l’idée de faire des missions (freinage, reconnaissance en force…) le cœur du jeu : au centre de la doctrine, elles parlent à tous les stagiaires. Reste à déterminer comment les représenter. Nous optons pour des modifications au rapport de force, au potentiel de mouvement ou à la réaction aux combats. Ainsi un gtia qui s’est vu attribuer une mission de « freinage » ne peut infliger plus d’un pas de pertes ni subir plus d’un pas de perte dans une action de combat ; une unité en « défense ferme » voit son potentiel de combat augmenter en défense uniquement, et ainsi de suite. D’autres règles viennent s’ajouter, qui prennent en compte l’aviation légère de l’armée de terre (alat), le brouillard de la guerre ou les délais des opérations de franchissement.

  • Comment modéliser le réel et vivre avec les approximations ?

Tout modèle est faux et l’objectif du wargame est de proposer une expérience de synthèse. Duel tactique se joue donc sur une carte découpée en hexagones de cinq kilomètres de large. Un tour représente quatre heures de jour ou huit heures de nuit. Si, pour la représentation des forces, il a été décidé de ne pas descendre en dessous du niveau gtia, c’est pour éviter que les joueurs ne manipulent des compagnies quand nous souhaitons qu’ils se préoccupent d’une manœuvre de brigade. Ils doivent donc, comme le ferait le chef occupant cette position, laisser le soin à leurs subordonnés de gérer leurs propres contingences. Ces derniers s’en acquittent-ils convenablement ? C’est le dé qui pour partie répond à cette question. Mais le constat au bout des quelque quatre-vingts parties de test, c’est qu’une attaque bien menée, avec un bon rapport de force et une bonne préparation, est couronnée de succès dans une écrasante majorité des cas.

Ce succès peut être parfois plus rapide ou plus lent qu’anticipé, et c’est bien ce qui nous intéresse. Surtout, les approximations ou les raccourcis n’ont qu’un but : ne pas entraver la réflexion. Ainsi, l’alat est-elle représentée de deux manières différentes : comme un gtia classique, qui participe à un combat pendant un tour puis regagne sa base – et sera à nouveau disponible au bout de quelques tours –, ou en interdiction, c’est-à-dire qu’elle ralentit le mouvement de l’ennemi dans sa zone d’influence, mais peut rester plusieurs tours sur la carte. Dans un autre domaine, il n’est possible de modifier l’ordre que d’un seul gtia par tour, afin de simuler la difficulté de réarticuler l’intégralité de ses unités en un clin d’œil, ce qui serait très difficile sur le terrain réel. Enfin, pour simuler le brouillard de la guerre, tous les pions démarrent comme de simples « contacts ». Certains sont des leurres qui, une fois reconnus, disparaissent et laissent peu à peu apparaître le contour du dispositif ennemi.

S’agit-il d’approximations ? Absolument. Est-ce ainsi que les choses se déroulent en réalité ? Pas du tout. L’effet produit est-il celui recherché ? Beaucoup plus que si l’on établissait de longues procédures qui ralentiraient le jeu et contraindraient les joueurs à se concentrer sur la règle plutôt que sur la conduite. Ces raccourcis étant étalés au grand jour, ils ne sont ni une entrave ni un piège13.

  • Less is more

Cela peut paraître paradoxal, voire contre-intuitif, mais la multiplication des règles, prenant en compte chaque aspect des combats et les détaillant, offre moins de « réalisme » qu’une itération. Prenons un exemple réussi : dans Cobra (tsr, 1977), qui simule la campagne de Normandie de 1944 avec comme unité de base le régiment ou la brigade, la suprématie aérienne des Alliés n’est pas représentée par la possibilité d’attaquer les unités allemandes qui se déplacent, mais d’une manière détournée. À chaque tour (qui représente deux ou trois jours), on détermine la météo ; si le ciel est dégagé, le potentiel de mouvement des Allemands est réduit des deux tiers ; si le ciel est couvert, il est réduit d’un tiers et s’il pleut à verse, leur potentiel est entier. Voilà une manière simple de figurer les difficultés de mouvement générées par un ciel empli de chasseurs-bombardiers ennemis sans avoir à entrer dans une mécanique complexe.

Harpoon (gdw, 1987) met en scène les combats navals modernes avec une très grande précision. Mais son système d’adjudication, très procédural, a pour effet qu’un tour représentant trente secondes de temps réel se résout rarement en moins de trente minutes. Cette distorsion est irréaliste ; un simulateur serait ici plus adapté qu’un jeu. Les jeux de guerre doivent aller à l’essentiel sans abreuver les participants de données ou de procédures. Dans Duel tactique, un tour représentant quatre heures de temps réel peut s’effectuer en trente minutes si l’on manipule une division, ce qui place les joueurs sous pression et permet de garder le rythme. Pour cela, de nombreux aspects ne sont pas représentés. Un choix assumé par les concepteurs du jeu.

  • Le wargame pour quoi faire ?

Créer un wargame est une expérience passionnante et enrichissante. Pour l’ensemble des personnes impliquées dans la création et le développement des règles de Duel tactique, la phase d’écriture et de test a été très formatrice. Ce fut l’occasion de regarder la doctrine et les pratiques autrement, non comme une matière inerte, mais comme une mécanique vivante. Les wargames ne permettent ni de lire l’avenir ni de trouver des solutions. Ils sont le reflet des biais cognitifs de leurs auteurs, auxquels s’ajoutent ceux des joueurs, et des choix de représentation de ces derniers (échelle, espace, temps). Ils sont pourtant des outils très performants pour apprendre à décider dans l’incertitude, mais surtout pour identifier les problèmes, notamment lorsque ceux-ci reviennent régulièrement.

On estime qu’entre 1918 et 1941, l’us Navy a organisé plus de deux cents parties de wargames d’un conflit contre le Japon, qui lui ont permis, selon Nimitz, d’anticiper à peu près tout ce qui s’est produit dans le Pacifique. À peu près tout, sauf Pearl Harbor, une option qui n’avait jamais fait l’objet d’une étude approfondie, ni d’un wargame d’ailleurs. Peu avant le début de la Seconde Guerre mondiale, le général Prételat avait organisé un jeu sur un hypothétique franchissement des Ardennes par des divisions blindées allemandes, montrant que cela n’avait rien d’impossible. Peut-être aurait-il fallu, pour que l’on en tienne compte, que des dizaines d’exercices aboutissent à la même conclusion. Mais pour cela, le wargame aurait dû être pratiqué de manière intensive et systématique au sein de l’armée française. Et si c’était une idée ?

1 Cette présentation, à laquelle le directeur de l’Académie militaire était opposé, doit beaucoup au soutien du souverain de Prusse, Frédéric-Guillaume III (1770-1840), qui avait déjà joué avec un prototype du jeu développé par le père de Reisswitz vers 1813 et en avait gardé un excellent souvenir.

2 E. H. Dannhauer, « Das Reißwitzsche Kriegsspiel von seinem Beginn bis zum Tode des Erfinders, 1827 », Militär-Wochenblatt, 1874, p. 529.

3 Cymopolée est un jeu visant à faire travailler ensemble un régiment et ses soutiens, développé par trois officiers stagiaires en s’inspirant du système des Matrix Games imaginés par Tom Mouat : http://www.mapsymbs.com/wdmatrix.html

4 F. McHugh, The Fundamentals of wargaming, Newport, usnwc1966, pp. 1-3.

5 Un officier supérieur donnait cette définition du wargaming : « C’est un mot que l’on emploie au sein de l’institution pour dire que l’on fait des wargames et qui permet de ne pas en faire. » Rien n’est plus juste.

6 Un jeu est en cours d’élaboration pour intégrer une méthode de wargame ultra-rapide permettant de compléter les conclusions de la confrontations ma/me.

7 Je tiens à remercier les colonels Meunier et Chènebeau et le lieutenant-colonel Baillard pour leur appui au développement de Duel tactique, ainsi que les stagiaires des 134e et 135e promotions de l’École de guerre-terre.

8 « Tous les modèles étant faux, un scientifique ne saurait en obtenir un modèle “correct” par une élaboration excessive. Au contraire, suivant la voie de Guillaume d’Ockham, il doit viser une description économe du phénomène naturel » , G. E. P. Box, Journal of the American Statistical Association, vol. 71, n° 356, décembre 1976, p. 792.

9 On peut regrouper les jeux selon deux grandes catégories : ceux dits heuristiques (sans la moindre part de hasard, comme les Échecs ou le Go) et ceux dits stochastiques, avec une part de hasard plus ou moins grande introduite par des dés (comme le Monopoly) ou des cartes (comme le Tarot). Le Jeu de l’oie est le jeu stochastique par essence : il n’existe aucune stratégie ; on lance simplement le dé jusqu’à atteindre la case centrale.

10 La théorie de la destruction mutuelle assurée (mad) est l’œuvre du brillant mathématicien J. V. Neumann, qui fera notamment partie du premier bureau scientifique de la Research and Development (rand).

11 Sans compter que la liste en serait à la fois infinie et incomplète, car, comme l’a justement fait remarquer le prix Nobel d’économie (2005) Thomas Schelling, « personne ne peut dresser la liste de ce qui ne peut pas arriver ».

12 Des réticences demeurent, notamment lorsque de bons jets de dés permettent à une unité en nette infériorité numérique de tenir tête à un volume de force écrasante – une réticence qui ne cessera jamais de m’étonner au sein d’une institution qui honore chaque année le souvenir de Bazeilles et de Camerone.

13 Pour citer encore G. E. P. Box (ibid.) : « Tous les modèles étant faux, le scientifique doit s’intéresser à ce qui est le plus problématiquement faux. Il est inapproprié de se préoccuper des souris quand des tigres rodent dans les parages. »

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