N°48 | Valeurs et vertus

Rémi Monaque
Trafalgar, 21 octobre 1805
Paris, Passés Composés, 2021
Rémi Monaque, Trafalgar, 21 octobre 1805, Passés Composés

Trafalgar n’est guère populaire dans la mémoire française. Avec Waterloo, cette bataille navale serait l’un des clous du cercueil des ambitions françaises. En 2005, année du bicentenaire de Trafalgar et Austerlitz, beaucoup de choses furent dites et écrites sur la participation inégale de la France à ces deux commémorations. Le bicentenaire de la mort de Napoléon en mai 2021 a démontré une nouvelle fois la sensibilité de la question des commémorations liées au Premier Empire. Heureusement, pour le lecteur désireux d’un traitement dépassionné du sujet, Rémi Monaque, officier de Marine et historien, propose avec son Trafalgar, 21 octobre 1805, un ouvrage remarquable. Publié une première fois en 2005 à l’occasion du bicentenaire de Trafalgar, il est réédité en mai 2021 par les éditions Passés composés à l’occasion de l’année Napoléon. Certains pourraient s’offusquer de la coïncidence du bicentenaire de la mort de l’exilé de Sainte-Hélène et du rappel de la défaite cinglante infligée à la France. C’est au contraire, à mon sens, un excellent prétexte pour se plonger dans l’histoire de cette bataille et lever le voile qui occulte sa mémoire. Long de quatre cents pages (notes et bibliographie comprises), cet ouvrage n’en consacre qu’une cinquantaine à la bataille proprement dite. Le reste est une passionnante mise en perspective de l’affrontement, qui passe en revue, de manière synthétique mais précise, les forces en présence, les stratégies, les opérations préliminaires, les matériels, les hommes (chefs et équipages), le bilan et la postérité de la bataille. L’analyse de Rémi Monaque se fait à travers un triple prisme, celui des nations participantes : Royaume-Uni, France, Espagne. Le tout s’appuie sur un vocabulaire marin précis (un glossaire en début d’ouvrage guide le lecteur non familier). Le propos met en relief le rôle des chefs dans la conception et la conduite des opérations : Nelson, brillant tacticien ; l’amiral français Villeneuve, officier très inégal, pessimiste, qui ne croit pas en ce qu’il fait ; des capitaines talentueux dont les initiatives individuelles ne permettent pas de forcer le sort ; enfin, Napoléon. Loin de se désintéresser de la stratégie navale, l’Empereur raisonne celle-ci comme une manœuvre terrestre et fige ses amiraux dans un état de passivité fatale. Rémi Monaque est sans appel sur le sujet dans sa conclusion. Enfin, de copieuses annexes approfondissent la lecture sur des points techniques. L’ensemble du propos est équilibré. L’auteur énonce et argumente ses thèses, reste mesuré quand les sources ne permettent pas de trancher (par exemple, la mort de Villeneuve, suicide ou meurtre ?). La lecture de cet ouvrage permet de dissiper de nombreuses idées fausses entourant cette bataille navale. Trafalgar, 21 octobre 1805 se distingue par les qualités d’écriture de Rémi Monaque qui nous offre un texte fluide, agréable à lire. Le récit de la bataille est remarquable.

Maxime Yvelin

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