N°33 | L'Europe contre la guerre

Romain Vignest et Jean-Nicolas Corvisier (dir.)
La Grande Guerre des écrivains
Paris, Classiques Garnier, 2016
Romain Vignest et Jean-Nicolas Corvisier (dir.), La Grande Guerre des écrivains, Classiques Garnier

Cette très volumineuse étude affirme ne pas prétendre à l’exhaustivité, ce qui est naturellement exact, mais brosse un tableau à la fois très large et très varié des auteurs, pour l’essentiel français, dont l’œuvre a été profondément marquée par la Grande Guerre. Réunissant plus de trente-cinq contributions, le livre est divisé en trois parties : « En guerre », pour les auteurs combattants ou pacifistes pendant la guerre elle-même, « L’empreinte », pour les influences ultérieures, et « Regards étrangers », pour quelques travaux internationaux. Les contributeurs sont extrêmement variés, du professeur émérite reconnu au jeune chercheur, ce qui donne à l’ensemble une diversité d’approches et de préoccupations intéressante. Après une introduction historique de Jean-Nicolas Corvisier, qui s’efforce de dresser un bilan de l’ensemble de ces publications et parfois des travaux associés, Jean-Pierre Rioux ouvre le cycle des contributions avec « Charles Péguy en pantalon rouge ». Aucun grand nom ne manque ensuite, de Claudel à Barrès et de Léautaud à Romain Rolland, de Gide à Duhamel, d’Apollinaire à Cendrars, de Dorgelès à Giono et de Céline à Drieu la Rochelle. Parmi les contributions les plus originales, celle de Cécilia Suzzoni, consacrée à « Albert Thibaudet, La campagne avec Thucydide. De la guerre du Péloponnèse à la guerre de 14-18 : une certaine figure de la guerre antique ». Dans la seconde partie, outre les classiques Roger Martin du Gard et Proust, on trouve également des approches plus larges ou plus atypiques, comme celle sur la littérature populaire et le roman d’aventures par Jean-Nicolas Corvisier et Guy Talon, ou l’article de Jean-Louis Loubet del Bayle sur « La guerre de 14. Des écrivains et les désillusions du progrès (Aragon, Drieu la Rochelle, Malraux) ». La troisième, enfin, commence par une étude comparative menée par Georgette Wachtel de trois grands auteurs (Genevoix, Jünger et Remarque), entre témoignages, récits édulcorés et affirmations politiques (évolutives). L’originale étude de Guy Dugas sur « La Grande Guerre dans l’imaginaire maghrébin » s’appuie sur les travaux de trois artistes dont les œuvres s’échelonnent de 1920 à 1980, tandis qu’en fin de volume, Milivoj Srebro revient sur le souvenir du désastre serbe de l’hiver 1915 (« Le Golgotha albanais ou la traversée des Enfers. L’écho de la Grande Guerre dans le roman serbe »), véritable historiographie de la question jusqu’aux débats de la fin du xxe siècle sur le projet serbe et la Yougoslavie. Un volume qui plaira indiscutablement aux amateurs de littérature de la (Grande) Guerre, mais qui, plus largement, peut apporter pistes et éléments de réflexion à ceux qui s’intéressent aux traces et influences de ce conflit dans le temps long.

PTE

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