N°32 | Le soldat augmenté ?

Jean-Yves Le Naour
1917
La Paix impossible
Paris, Perrin, 2015
Jean-Yves Le Naour, 1917, Perrin

En quatre cents pages, l’auteur démontre brillamment comment l’année 1917 fut, à maints égards, une année de flottement sur tous les fronts et dans l’ensemble des pays, chacun cherchant une porte de sortie permettant de mettre fin à cette guerre qui devait durer trois mois ou, dans le cas de l’état-major allemand, à légitimer la continuation des combats. D’un abord facile et bien écrit, ce livre se lit facilement, même si certaines explications sont parfois quelque peu complexes. Une fois de plus, les qualités des chefs militaires, toutes nationalités confondues, sont décriées. Anglais, Français, Italien ou allemand, le généralissime ne fait pas grand cas de la vie humaine et applique sans originalité le principe de la guerre d’usure qui saigne autant celui qui la mène que celui qui est censé la supporter… 1917 est l’année des mouvements sociaux qui, malgré les allégations des politiques et des chefs militaires, sont d’abord liés aux conditions difficiles de survie de la population à l’arrière. C’est également l’année des mutineries, dont la spontanéité, en France, fait suite à l’entêtement de Nivelle à maintenir sa stratégie face à un ennemi qui a eu le temps d’adapter son dispositif. Certains soldats, depuis trois ans sur le front, comprennent très bien l’inutilité des pertes au regard des maigres gains obtenus. 1917 est aussi l’année des tentatives de paix, dont la première initiative semble venir de l’Allemagne qui, cependant, envisage de conserver ses acquis territoriaux (Alsace-Lorraine et Belgique). Puis ce sont, de manière non coordonnée, des tentatives venant du pape et du nouvel empereur d’Autriche-Hongrie qui a compris que son empire éclatera sous l’impulsion des nationalités faute d’une paix rapide. Cette fois encore, par manque de réactivité de certains responsables français ou britanniques, ou devant l’impossibilité de se résoudre à abandonner l’Istrie et la Dalmatie, ces tentatives achopperont. 1917 est surtout l’année de la révolution russe, qui entraîne la sortie de guerre du « rouleau compresseur » et, en contrepoids, l’entrée en guerre des États-Unis provoquée par la guerre sous-marine à outrance et dont personne, surtout pas les Allemands, n’a perçu la puissance tant industrielle que démographique. C’est enfin l’année du resserrement des liens entre alliés. D’une part, les Allemands allègent la charge des Autrichiens avec la victoire de Caporetto. D’autre part, la déroute qui s’ensuit insuffle l’énergie nécessaire au peuple italien qui, jusque-là, ne comprenait pas l’intérêt de la guerre et oblige ses alliés à le soutenir. En France, l’arrivée au pouvoir de Clemenceau, bien expliquée, résulte de la lassitude du pays devant l’absence de résultat. À conseiller à tous ceux qui s’intéressent au sujet.

Philippe Mignotte

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