La formation des hommes s’inscrit dans un temps long. Certes, les investissements donnent des résultats immédiats et visibles dans les domaines formels et concrets, mais l’essentiel ne se mesure que quelques années plus tard. On espère que les graines semées lèveront au fil des ans pour asseoir une personnalité. Car l’essentiel se trouve dans les esprits et dans les cœurs.
C’est vrai pour la formation des chefs militaires, les officiers, dont le révélateur de commandement sera la mise en situation de responsabilité pleine et entière. D’autant plus que le métier des armes est hors du commun. Leur responsabilité sera d’« infliger la destruction et la mort, au risque de leur vie, et de remplir, avec les hommes et les femmes placés sous leur commandement, la mission qui, dans son esprit, est toujours à exécuter coûte que coûte, au nom de la Nation dont ils tiennent leur légitimité »1. Les occasions de constater les effets essentiels de la formation ne se présenteront qu’à la date des soubresauts du monde et dans des circonstances exacerbées.
Quel est l’essentiel à transmettre ? Comment et quand le faire ? De quel officier a-t-on besoin ? L’objectif recherché détermine la transmission des savoirs et des cultures.
- Fondamentaux et capacités d’adaptation, d’invention
Le contexte de sécurité dans lequel les futurs officiers vont accomplir leurs missions est en pleine mutation. L’histoire des relations internationales dit la complexité et l’imprévisibilité du monde, et enseigne que l’enchaînement des faits invente parfois des logiques plus vite que l’intelligence de l’homme ne les comprend.
Nouveaux risques, nouvelles formes de guerre, nouvelles doctrines, nouveaux procédés tactiques se dessinent sans cesse, disparaissent parfois. Les nouvelles solutions inventées soulèvent des espérances, mais aussi des désillusions. De cela, il ressort que les équilibres ne sont jamais totalement assurés, que l’émergence de nouvelles menaces, de nouveaux défis est permanente. Et les responsables doivent s’adapter continuellement et tenter opiniâtrement de prévoir l’imprévisible. Dans le même temps, l’officier est dans l’action. Il affronte l’adversité avec sa troupe. Il doit maîtriser les compétences techniques et tactiques pour gagner dans l’instant et dans la tourmente.
Il est vain de vouloir former des responsables en général, des officiers en particulier, ceux qui seront envoyés dans le tumulte par leur pays, en fonction d’un type identifié de menaces. La seule certitude qu’offre l’horizon est l’imprévisibilité. Dès lors, il convient de forger une très grande capacité d’adaptation pour s’inscrire dans les situations les plus diverses, une capacité d’invention pour faire face à l’imprévu et à l’impensable, assorties de compétences et de références solides, des fondamentaux techniques et culturels sur lesquels l’officier prendra efficacement appui dans l’action.
Le paradoxe de la formation du jeune chef tient en la combinaison du concret, le « hautement matériel »2, la technique, le geste, et de l’intelligence, l’esprit. Cela doit être l’un et l’autre. Les jeunes officiers, dès leur premier emploi, puis au gré de leurs responsabilités croissantes, doivent être capables de s’adapter aux nouveaux défis, d’inventer des solutions et d’agir concrètement. Seule une formation complète, développant la curiosité intellectuelle, la rigueur de raisonnement, la remise en cause et la réflexion permanentes, et assurant tous ces fondamentaux physiques, techniques et tactiques, répond à cette équation.
L’officier est un chef capable de décider en situation difficile, un chef en vue du combat, quelle que soit sa nature, animé d’une farouche volonté de gagner. Il apprend à commander, c’est-à-dire à discerner dans la complexité et, pour cela, il faut forger l’intelligence de situation afin de pouvoir comprendre sans avoir toutes les données, dans le brouillard ; à décider dans l’incertitude, et il faut développer la force de caractère pour prendre des risques calculés et oser avec audace ; à agir dans l’adversité, il faut pour cela construire un « savoir-être » permettant de fédérer les énergies, de susciter l’action collective et décider en conscience. Il commande au sein d’une collectivité, les armées, dont il intègre les principes de fonctionnement et les ressorts.
- Savoir, savoir-faire, savoir-penser et savoir-être
Ainsi, pour discerner dans la complexité, avec une intelligence de la situation, il faut à l’officier une tête bien faite, dotée d’une solide culture générale, capable d’actualiser les connaissances, de les confronter, de les interpréter, de les mettre en perspective et de les exprimer. La curiosité intellectuelle et l’ouverture d’esprit en sont le ferment.
Pour décider dans l’incertitude, avec force de caractère, il faut savoir prendre des risques calculés et oser avec audace, se lancer. La force de caractère se forge par la force physique et morale au prix d’un exercice régulier et d’un endurcissement progressif. À ce prix naît le courage physique, la volonté de se dépasser et de vaincre. Mais il s’agit aussi de force morale, faite de volonté, d’opiniâtreté, d’indépendance d’esprit et de courage intellectuel. Celle qui manque le plus souvent aujourd’hui et qui permet de dépasser le stade de la simple reproduction. Reproduction des idées, des comportements au sein de « clans » identifiables par des habitudes, des signes ou des pensées distinctives. Cette tendance, tout à fait naturelle chez les jeunes, doit très rapidement être dépassée. Il faut pour cela mettre l’élève officier le plus souvent possible en situation de responsabilité, dans des contextes qui ne lui sont pas familiers, afin qu’il opère de véritables choix. Des choix intellectuels, après acceptation de la complexité et de la confrontation à la difficulté intellectuelle. Plus tard, ce seront peut-être les choix moraux, face à tel cas de conscience, les choix éthiques, qui lui dicteront les actions à conduire.
Pour agir dans l’adversité, il faut développer le savoir-être afin de mener les équipes, fédérer les énergies, susciter l’action collective, affronter le danger et respecter collectivement les valeurs de notre pays. Goût du travail en équipe, des responsabilités humaines, de l’éducation des autres, intérêt porté à ses subordonnés, sens de l’intérêt général sont les préalables à la maîtrise des techniques de communication, de pédagogie, de psychologie.
Le socle de références devra être suffisamment solide pour y puiser aux moments cruciaux, fonder ses décisions, en conscience, et, par l’exemple et la fermeté de ses choix, guider ses soldats et leur servir de référence. L’officier donne du sens à l’action quelles que soient les circonstances.
Enfin, il doit avoir acquis les fondamentaux du comportement militaire, faits d’esprit d’initiative et d’obéissance, de capacité de proposition et de discipline intellectuelle, de curiosité d’esprit et de rigueur professionnelle, de confiance et de contrôle, qui fonderont sa légitimité et son efficacité au sein de l’institution.
Au-delà des indispensables connaissances (le savoir) et de la maîtrise des techniques (le savoir-faire), c’est bien le savoir-être et le savoir-penser qui permettront au jeune officier de savoir décider et commander. Et d’inventer les solutions aux défis de demain, dont nous ne connaissons aujourd’hui ni la nature ni l’ampleur. La combinaison de la réflexion et de l’action n’est pas le résultat uniquement d’une accumulation de connaissances et de compétences techniques, mais d’une capacité intellectuelle fondée sur la curiosité et la culture ainsi que d’une capacité physique et humaine fondée sur l’équilibre et la solidité des références.
Les objectifs de formation composent donc un tout et la formation « intégrée » (pluridisciplinaire, mêlant formation académique finalisée sur le métier et formation militaire et humaine) trouve tout son avantage pour forger l’ensemble de ces aptitudes dans la durée et de manière approfondie.
- On ne peut pas tout transmettre
Dans ce panel, la pédagogie classique a toute sa place, avec ses différents procédés : le maître, instructeur ou professeur, enseigne, fait exercer, dynamise, contrôle les acquis. Mais elle trouve ses limites dans les domaines qui relèvent de la culture du métier plus que du savoir : le contact humain dans le commandement, les valeurs dont on doit être porteur, l’éthique au cœur de l’action, l’identité liée à la spécificité du métier militaire, l’expérience du métier des armes. Or il s’agit là de domaines essentiels pour le chef.
Le facteur humain dans le commandement, fait de considération de la personne et de souci d’élever, ne s’apprend pas dans les livres. Au-delà de l’apprentissage des principes du commandement, on en fait prendre conscience par l’exemplarité de l’instructeur, la pertinence des témoignages. La mise en situation réelle sera le moment de la concrétisation où la puissance des regards des subordonnés suscitera souvent le déclic fondateur pour le jeune chef.
L’éthique associée aux valeurs dans lesquelles la France se reconnaît est fondamentale. En réalité, dans des situations très diverses, confuses, compliquées et dures, il y a de forts risques de perdre les références de comportement. Le cas de conscience peut se poser dans l’imprévisible et l’impensable. Ces circonstances dépassent le cadre des règles connues. Il s’agit de vaincre la violence sans y succomber. Le chef est plus que lui-même. Porteur d’une légitimité, il personnalise une mission, un pays, ses valeurs. C’est un métier où l’on ne triche pas. L’action paroxystique, les risques encourus, les conséquences parfois dramatiques sont révélateurs des vérités sur les comportements, sur les liens qui tissent le groupe, sur la confiance qui le soude. Le chef fait référence, montre le chemin, donne du sens à l’action et accorde les actes à l’esprit de la mission. C’est lui qui a le devoir de commander, car tous les yeux seront tournés vers lui. Il devra être intransigeant sur les comportements.
Les conditions et la nature du métier militaire mettent l’éthique au cœur de l’action. Le métier des armes force le jeune chef à s’interroger sur lui-même pour assumer sa mission. Or l’éthique est difficile à enseigner parce qu’il s’agit de forger une boussole intérieure qui ne s’affolera pas lorsque le champ magnétique sera fortement perturbé. Cela commence par l’acquisition de la déontologie qui fixe les règles du métier, les feux rouges à respecter, les modalités des actes. Elle pose les principes à respecter et envisage le spectre du prévisible et des cas compliqués qui peuvent se poser. Mais il faut développer la boussole intérieure. L’éthique se nourrit des valeurs, des repères culturels, des principes transcendantaux, sur lesquels il faut s’appuyer pour faire face à l’impensable, ce à quoi le chef, seul à assumer la responsabilité, se raccroche au moment de décider en conscience. C’est le socle sur lequel il s’appuie. Dans le feu de l’action, l’angoisse envahissante, l’affolement collectif, l’urgence absolue, le cas de conscience, c’est le fonds propre dans lequel il faut pouvoir puiser, quasi instinctivement, pour prendre la bonne décision ou la moins mauvaise. Pour cela il faut avoir réfléchi aux questions, avoir assimilé des repères, avoir forgé des références, s’être préparé profondément. La pédagogie de l’éthique est ainsi très difficile. Elle s’organise avec la réflexion sur les principes de l’exercice du métier des armes, des témoignages réels, l’étude de cas concrets.
Enfin, la nature du métier militaire confère à la cohésion, l’esprit de corps, et à l’identité du groupe une part importante dans l’efficacité. Le jeune chef s’intègre dans le groupe, y trouve des repères et y développe sa personnalité. Pendant sa formation, l’identité de l’école et ses traditions répondent à la même logique. La difficulté est alors de discerner, au-delà des codes, les valeurs qui les sous-tendent, l’état d’esprit qui les anime. À Saint-Cyr, les vraies valeurs à transmettre aux jeunes sont celles de l’enthousiasme, du courage, du service de son pays, du don de soi, de l’honneur, du respect des autres, de la camaraderie, de la solidarité naturelle. Le risque est ici de se satisfaire de la simple reproduction formelle de gestes ou de codes sans les relier à leur véritable sens.
- Faire face à l’impatience
La transmission des valeurs, la constitution de repères et d’une identité s’exercent sur une jeunesse enthousiasmante parce qu’avide de progresser, mais parfois rétive. La diversité sociologique3 appelle un effort d’éducation, d’autant que les caractéristiques sont celles de la société moderne, et l’on regrette une assez faible culture historique, une plus grande difficulté de concentration, un esprit collectif moins développé ou une habitude plus grande de loisirs individuels.
L’action pédagogique doit tenir compte des aspirations naturelles du jeune élève officier qui sont parfois à l’opposé de son intérêt de formation. Il est naturellement et légitimement attiré par la maîtrise des compétences et des savoir-faire technico-opérationnels qui lui garantiront l’efficacité au plus tôt. Il y consacre tout son enthousiasme, sa volonté de bien faire, son goût de l’action et se montre impatient. Il peut se suffire de schémas ou de recettes simples, devenant surtout un exécutant ou répétiteur sans se préparer à la complexité, au savoir-penser tactique, pour, dans le cadre des ordres reçus, accepter la complexité et la dépasser, trouver la meilleure solution, bref développer son intelligence de situation, utile dès le premier engagement opérationnel. Dans cet esprit, il peut concevoir le commandement selon une logique « mécanique » (« je donne les ordres, ils exécutent »), sans prendre conscience de la logique « humaine » utilisant des ressorts qu’imposera la réalité.
Son idéal est parfois bien loin de la réalité du métier, au point que certains, heureusement en nombre réduit, ont « imaginé » leur métier à tort, pris dans l’enthousiasme de leur jeune vocation, parfois sous l’influence du cercle dans lequel ils se sont préparés. Cela peut les conduire à se crisper sur des certitudes, voire à exclure de leur réseau ceux qui ne partageraient pas la même vision. On voit là l’importance de faire prendre conscience de la réalité et des enjeux du métier des armes, et donc d’ouvrir l’esprit par une prise de conscience d’emblée. S’agissant de jeunesse fougueuse, on mesure le doigté mais aussi la fermeté qu’il faut développer pour forcer le retour aux réalités.
- Transmettre ou construire ?
La transmission dans ces domaines consiste alors davantage à mettre en place les conditions, les pièces, pour construire une personnalité puis l’épanouir, plutôt qu’à uniquement apprendre. Il s’agit de poser des fondements, de provoquer des prises de conscience, de lancer et nourrir un processus de réflexion. La transmission s’appuie dans ce cas sur l’exemplarité, la responsabilisation, la confiance. Cette démarche prend du temps et peut dépasser celui imparti en école.
L’exemplarité s’impose, car vivre ses valeurs, c’est déjà les transmettre. Si les élèves acceptent d’acquérir des savoir-faire, consentent à apprendre des savoirs et à développer le savoir-penser, ils considèrent le savoir-être comme acquis, en particulier parce qu’il relève de leur vocation. L’exemplarité en sera l’outil : « Les jeunes n’ont pas besoin de maîtres à penser mais de maîtres à se conduire » (Montherlant). Les tuteurs, exemplaires et fermes, doivent être capables, présents sans être pesants.
La responsabilisation sera le vecteur motivant. Prendre des responsabilités oblige à se concentrer, à acquérir, à se dépasser, à donner du sens à son action, à prendre de la hauteur. « La jeunesse ressent un plaisir incroyable lorsqu’on commence à se fier à elle » (Fénelon). Les mises en situation de responsabilité seront toujours recherchées, progressivement augmentées en intensité. La transmission des traditions en fournit un bon exemple. Cet exercice s’appuie prioritairement, d’une promotion à l’autre, sur la responsabilisation. Ainsi la promotion d’anciens réfléchit à ce qu’il faut transmettre aux jeunes, s’interroge sur le sens de ses actions, propose au commandement les objectifs, le sens et les modalités, lequel lui confie alors la mission de transmettre les traditions aux jeunes. Encadré, cet exercice a le mérite de faire approfondir les valeurs de tradition par les anciens, car ils se retrouvent en charge de les expliquer et de les faire acquérir aux jeunes. Cette responsabilisation, qui n’exclut pas l’intervention lorsqu’il y a manque de discernement, a produit d’heureuses initiatives comme les séances de culture historique mises en place par les anciens au profit de leurs jeunes à Verdun et aux Glières.
Enfin, il faut faire confiance à l’élève, miser sur la dynamique positive, croire en un potentiel. Il ne sera pas qu’un exécutant, un répétiteur, mais une personnalité qui se construit. Il faut accorder cette confiance, car seule la réelle responsabilité constitue le déclencheur, le révélateur d’une personnalité. La confiance sera d’ailleurs réciproque.
- Prendre des risques en confiance
En agissant ainsi, l’éducateur prend des risques. Celui de l’erreur par manque de discernement. Au bout du compte, la mise en situation de responsabilité oblige l’élève à se révéler. L’école du discernement passe par cette liberté, puis par la correction positive du tuteur. Plus tard, le parcours professionnel en diverses situations de responsabilité affirmera la capacité de discernement et enrichira la personnalité par le cumul de multiples expériences, si possible exposées. Cela oblige à de la patience.
L’autre risque est celui du saut dans la réalité. La formation en école pourvoit en compétences et structure une personnalité équilibrée. La mise en situation de responsabilité, pleine et entière, le premier commandement comme chef de section ou de peloton seront des moments formateurs, fondateurs de la personnalité. Cette étape est celle des déclics inconscients, de l’obligation de se révéler. Elle fait partie finalement de la formation. Il faut pour cela considérer qu’après son passage en école, le jeune officier doit être employé. Il y est prêt individuellement, il ne faut plus retarder cette étape cruciale, le moment de la responsabilité sur les hommes. On distinguera l’individu, le jeune chef, prêt à l’emploi, et son unité, sa section, qui devra avoir assuré sa cohésion et affermi ses capacités, en présence de son chef, pour être utilisée dans telle mission sur tel théâtre. Le choix du premier adjoint, compétent, complémentaire, mais aussi pédagogue, ainsi que le tutorat par le capitaine les premiers mois comptent beaucoup. Contrairement à une fausse idée apparue récemment, la formation ne s’arrête pas en école mais se poursuit en régiment. Ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas mettre ces jeunes en situation de responsabilité, au contraire.
La formation initiale vise donc à conférer au futur officier le socle nécessaire et suffisant de qualités, de connaissances et de dispositions pour prendre des responsabilités croissantes, socle sur lequel il s’appuiera et construira.
- Pour conclure
« Tout se joue dans les commencements » (Paul Valéry). S’il faut absolument assurer de solides fondamentaux qui donneront à l’officier la compétence et la légitimité pour le métier militaire, l’enjeu consiste à ne pas former de simples exécutants, mais des officiers capables d’agir au combat et d’imaginer des solutions dans le cadre de la mission reçue en portant, en toutes circonstances, les valeurs de leur pays. En ce sens, la transmission de la culture du métier des armes vise à construire une liberté, loyale au regard des ordres, mais inventive pour in fine vaincre et gagner.
1 Fondements et principes de l’exercice du métier des armes dans l’armée de terre (Paris, janvier 1999).
2 Par opposition à ceux qui survolent le « bassement matériel ».
3 À titre d’exemple, sur les dix dernières années, 22 % seulement des élèves officiers de Saint-Cyr sont fils de militaires, 17 % sont issus de milieux modestes.