N°15 | La judiciarisation des conflits

Georges Fleury
On l’appelait le « Crabe-Tambour »
Le destin du lieutenant de vaisseau Pierre Guillaume
Paris, Perrin, 2010
Georges Fleury, On l’appelait le « Crabe-Tambour », Perrin

En 1977, le film Le Crabe-Tambour de Pierre Schoendoerffer avait dressé les contours d’une personnalité hors normes. Voici ce qu’en disait l’écrivain-cinéaste : « C’était un de ces capitaines légendaires ! Donc on a fait connaissance, et l’on s’est pris de sympathie. Quand j’ai commencé à écrire mon livre, Le Crabe-Tambour, je me suis dit qu’il y avait dans son histoire quelque chose qui m’intéressait. Ce n’est pas sa biographie, c’est mon histoire telle que je l’ai rêvée... »

On attend donc beaucoup de la biographie « officielle » parue trente ans plus tard pour corriger la part de légende et de mystère sur laquelle nous avait laissés ce film. Connaître un peu mieux Pierre Guillaume. La biographie rédigée par Georges Fleury comble ce manque. On peut regretter la forme épique donnée à sa trajectoire militaire et l’absence de rigueur dans un récit où l’auteur restitue artificiellement les bruits d’ambiance, les émotions, les petits gestes du personnage principal. Il est difficile de faire la part entre l’anecdote, la légende et l’invention, d’autant qu’on ne sait jamais si l’auteur a écrit une biographie ou une hagiographie. Le portrait qu’il dresse est à décharge plutôt qu’une tentative de comprendre ces officiers qui choisirent l’oas et sa dérive terroriste. Mais il échoue aussi à amener le lecteur à s’interroger sur ce choix. Guillaume apparaît engoncé dans sa destinée et jamais responsable de ses actes (par exemple, sa complicité dans la destruction d’un lct dans le port d’Alger qui causa la mort de deux marins). L’auteur éprouve de la sympathie pour l’homme mais n’arrive pas à la faire partager à son lecteur. Au final, on aura eu une seconde fois l’histoire du « Crabe-Tambour » et on sera passé à côté de la face cachée de Pierre Guillaume.


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